Victime d’une fracture du tibia le 21 septembre, peu après en avoir enfin fini avec une longue blessure à l’épaule, l’international français de 27 ans ne se risque pas à donner une date de reprise. « La première fois que je l’ai fait, ça m’a porté un peu préjudice », dit-il, alors que tout le monde avait en effet attendu son retour, qui avait dû être décalé. Toutefois, il espère revenir après la trêve du Tournoi des Six Nations, en février.
Sur le même sujet
Le pilier droit (57 sélections) est depuis cet été, et à 35 ans, le premier Français à jouer pour les quadruples champions d’Europe du Leinster. Il en témoigne
Comment allez-vous ?
Plutôt bien, j’ai repris la course donc, c’est bien. Il y a des signes positifs, j’ai encore quelques douleurs mais ça va. Ça s’atténue de séance en séance, on est sur la bonne voie.
Bouillez-vous d’impatience ?
J’essaie de ne pas trop me chauffer parce que sinon, le temps peut paraître plus long (rires). Pour l’instant, je continue de prendre mon mal en patience. Bien sûr, j’ai envie que le temps passe plus vite tout en essayant de ne pas brûler les étapes. Même si oui, j’ai forcément envie de reprendre rapidement (sourire).
Devient-on philosophe quand on enchaîne les coups durs ?
Ce n’est pas ma qualité première, la philosophie (sourire). Mais bon, ça fait partie de la vie, on apprend de ça, ça enrichit un peu son expérience personnelle. Tu peux voir le verre à moitié vide mais aussi à moitié plein, ça fait partie des étapes d’une carrière. Quand ça s’enchaîne comme ça, c’est long, c’est dur, mais ça va. 2024 ne m’a pas trop réussi, on espère que 2025 sera meilleure.
« J’avais besoin et envie d’être au contact des mecs, de râler quand ça ne va pas et d’être content quand ça va »
Que vous êtes-vous dit au moment de la blessure ?
Forcément, j’ai un peu accusé le coup, après huit mois sans jouer, sur mon troisième match. Je me sentais plutôt bien, ça allait de mieux en mieux, je retrouvais un peu de rythme, de physique. Quand ça arrive, tu en veux un peu à tout le monde, même si personne n’est fautif. Ce n’est pas comme si je m’étais pété au même endroit. C’était un coup du sort, la faute à pas de chance mais tu te dis « putain, pourquoi moi, pourquoi maintenant ? ». J’ai forcément ruminé le temps de sortir du terrain, et après, ça s’est plutôt bien passé. J’ai quand même plutôt vite retrouvé le sourire, je discutais avec les pompiers dans le camion, le dimanche, les gars sont passés à l’hôpital, c’était touchant.
Après votre opération, Sébastien Boboul disait que le staff vous trouverait deux ou trois trucs à faire. Cela a-t-il été le cas ?
Non, mais je suis resté pas mal au contact du groupe depuis ma blessure, je fais toutes les vidéos, les retours de match pour, déjà, ne pas trop être à la rue le jour où je reviendrai, mais aussi parce que j’en avais besoin mentalement, ça m’a peut-être évité de ruminer. Après la première blessure, quand ça fait trois, quatre ans que tu fais un peu la même chose toutes les semaines, tu as besoin d’être un peu à l’écart du truc, ça peut être bénéfique mentalement. Là, je n’en sentais pas le besoin. J’avais besoin et envie d’être au contact des mecs, de râler quand ça ne va pas et d’être content quand ça va (sourire). Je n’ai pas eu de tâche spécifique à faire, j’ai continué à agir comme quand je suis apte – je donne souvent mon point de vue sur ce qui ne va pas ou sur ce qui est bien – tout en essayant de rester légitime. Parce que forcément, quand tu es blessé, tu te sens un peu moins légitime.
Paul Boudehent, lui, confiait que vous étiez un exemple tant vous passiez de temps au club…
(Sourire.) Peut-être que quand je ne suis pas blessé, il ne se rend pas compte que je suis là. Je pense que c’est parce que je râle beaucoup ; vu que je n’en dépense pas le week-end, j’ai beaucoup d’énergie la semaine, donc je crie un peu partout dans les couloirs. Ils me charrient un peu tous en me disant qu’ils vont me donner des vacances ou me faire partir trois semaines [au centre de rééducation de] Capbreton pour avoir la paix.
Râlez-vous encore plus actuellement, vu le contexte ?
Quand je dis que je râle, c’est manière de parler. Non, j’essaie de discuter avec les mecs, individuellement, et pas de trucs hyper sérieux. Je ne suis pas un entraîneur. On boit un café, on mange un bout, on discute de ce qui va bien ou pas, de ce qu’on peut faire mieux. Je ne dis pas au mec « il faut que tu fasses ça, ça ou ça », ce sont plus des choses globales, sur les déblayages, par exemple. Peut-être que la personne avec qui je discute va en parler avec une autre, et que ça peut faire boule de neige.
Cela vous fait-il du bien ?
Oui, et j’espère que ça fait du bien au groupe, aussi. Moi, j’aime le rugby, donc échanger dessus, ça me plaît. Quand on fait des réunions, si je sens qu’il y a quelque chose à dire, je le dis. Je mets deux, trois pièces aux mecs quand ils font des « cagades », mais ça, c’est l’ambiance qu’on a ici, on aime bien se charrier. Parfois, c’est sûr qu’on y va peut-être un peu trop fort et que ça peut en énerver certains, mais ce n’est jamais mauvais esprit.
« On n’est pas en confiance, on n’a pas ce brin de réussite qu’on a pu avoir »
Est-ce facile de rester un leader dans ces conditions ?
Ce n’est pas toujours évident. Quand tu ne joues pas, c’est compliqué de dire « il faudrait faire ça ou ça », alors que toi, tu ne fais rien. Tu te sens moins légitime - c’est ce que je ressens, pas ce que les coaches me disent.
Comment vivez-vous les difficultés actuelles de l’équipe ?
On voit qu’on n’est pas super épanoui sur le terrain, qu’on ne prend pas autant de plaisir que par le passé. On n’est pas en confiance, on n’a pas ce brin de réussite qu’on a pu avoir, que d’autres équipes ont, sur les rebonds, les derniers gestes, la passe de plus qu’il faut faire et qu’on ne fait pas ou qu’il ne faut pas faire et qu’on fait… Tout ça, notre fébrilité près de la ligne, je pense que c’est lié à un manque de confiance. Les mecs s’engagent, la semaine, tout le monde bosse à 200 %. Moi, je me sens impuissant et, comme eux, je suis frustré. Parfois, ça bout à l’intérieur, mais c’est toujours plus facile quand on n’est pas sur le terrain, où il faut aller vite, où il y a de la pression.
La Rochelle 1er/9 pts - Leinster 2e/9 pts
Lieu La Rochelle (stade Marcel-Deflandre) Horaire Dimanche, à 16 h 15 Arbitre M. Amashukeli (GEO) Télé En direct sur France 2 et Bein Sports Internet sudouest.fr