Joueur de l’ASM pendant trois saisons (2016-2019), de Castres et de Bordeaux où il fut notamment entraîné par Christophe Urios, le trois-quarts centre Rémi Lamerat était l’homme de la situation pour évoquer le nouvel homme fort de Clermont avant le match de clôture de la 18e journée, ce dimanche, au stade Chaban-Delmas.
On imagine que le retour à Bordeaux de Christophe Urios, aujourd’hui à Clermont, est particulier ?
"On ne l’appréhende pas comme quelque chose de particulier. On savait que ça ferait parler dans la semaine, c’est normal. Mais s’arrêter au retour d’un coach qui a été écarté du club il y a quelques mois, ne correspond pas vraiment à l’approche que doit avoir un sportif de haut niveau. Ce match aura, certes, un contexte particulier, mais on va surtout s’attacher à bien analyser et contrer cette équipe de l’ASM qui sort d’un gros match face à Castres.
Donc, le retour de Christophe Urios à Chaban-Delmas va alimenter les conversations à la machine à café et dans les médias, mais nous, joueurs, on ne va pas en parler et ça ne sera pas la clé du match."
Vous avez eu Urios comme coach dans deux clubs différents (Castres et Bordeaux), quel type d’entraîneur est-il ?
"Il n’y a pas besoin, je crois, de travailler avec lui pour percevoir ses particularités."
"Tout le monde le connaît, il a construit sa carrière et sa force autour du management. Il est bien sûr passionné par le rugby, mais je pense qu’il a encore plus de passion pour manager les hommes. Derrière cela, il a une méthode bien à lui."
Et quelle est cette méthode ?
"La définir est compliqué et pourrait être réducteur. Ce qui m’a toujours frappé, c’est sa faculté à essayer d’embarquer tout le monde derrière l’équipe en s’imprégnant du territoire et de l’histoire du club, avec ses forces et ses faiblesses. Et il apporte sa patte pour faire adhérer à un projet commun. Parfois ça marche, d’autre fois non."
Diriez-vous que dans sa gestion des hommes, Urios a l’art de tirer le meilleur des joueurs ?
"Je ne sais pas. Ce n’est pas le coach qui a le discours le plus émotif que j’ai connu. Jouer sur l’émotion c’est bien, mais ce n’est pas pérenne."
"Christophe est quelqu’un de très organisé, très carré, contrairement à ce que l’on peut penser, derrière son côté gueulard et franc du collier. Il n’utilise pas vraiment l’arme émotionnelle."
Vous qui connaissez l’ASM, est-il compatible avec ce club ?
"Oui, bien sûr. J’ai envie de dire que tous les managers sont compatibles partout. Est-ce que tout le monde pensait que Vern Cotter serait compatible avec l’ASM à son arrivée ? Je ne sais pas. Pour Christophe, l’avenir le dira. Mais il a derrière lui à Clermont un territoire fort et une véritable culture rugby. Je ne sais pas s’il réussira à l’ASM, mais le challenge doit sacrément le stimuler."
Comment avez-vous vécu son éviction de l’UBB en novembre dernier ?
"C’est délicat pour un joueur de s’exprimer sur ce type de sujet ou de prendre parti. Laurent Marti, qui est un excellent président, avait ses raisons, mais je ne les connais pas."
Avez-vous quand même été surpris ?
"Oui et non, car il n’y a plus grand-chose qui me surprend aujourd’hui dans le rugby. On était en vacances, je l’ai appris alors que j’étais peinard dans mes vignes. C’est plus mes copains qui voulaient savoir par textos qui étaient choqués.
"Connaissant Laurent Marti, brillant et intelligent, je savais que sa décision allait forcément dans le sens des intérêts du club. Mais là aussi, l’avenir dira s’il a eu raison ou pas."
"Après, malgré toute l’affection que j’ai pour Christophe Urios, aujourd’hui, je suis estampillé UBB et je roule derrière mon club et son président."
Est-ce possible de s’entendre avec Christophe Urios, chantre des vins du Minervois avec son château Pépusque alors que vous êtes très investi dans le vignoble bordelais… ?
"(rires) Je m’entendais bien avec lui sauf quand il parlait pinard. Il disait que son vin était le meilleur au monde alors que c’est de la piquette… Je rigole bien sûr. C’était un sujet de conversation, là aussi, avec beaucoup de passion de sa part et de la mienne."
Entretien réalisé par Christophe Buron (La Montagne - 18/02/2023)
De Toulouse à Bordeaux, en passant par Castres et Clermont, sans oublier ses dix-neuf matchs en équipe de France, Rémi Lamerat s’apprête à raccrocher les crampons. "Oui, j’arrête en fin de saison. Je n’ai pas fait d’annonce officielle, je n’avais pas envie de polluer le climat sportif, mais bon, ce choix était pour moi une évidence. Il n’y a rien eu de difficile. Je ne sais pas encore ce que je perds, sans doute beaucoup, mais je sais ce que je gagne et je gagne gros, avec l’aspect familial et de nouveaux projets. Après, on ne va pas se mentir, physiquement ça devient dur. Le sport à ce niveau, c’est fantastique, tu vis des émotions uniques, ça demande aussi des sacrifices. Je ne me plains pas, je l’ai toujours fait avec le sourire, mais, avec l’âge, c’est plus compliqué. Et je suis un chanceux. À 20 ans, j’avais déjà fait deux ruptures des croisés, j’aurais signé pour une carrière qui se termine à 33 ans."
C. Buron (La Montagne - 18/02/2023)