Joueur emblématique du club, retraité en 2018, Aurélien Rougerie va quitter le poste de team manager qu’il occupait depuis trois ans pour endosser le costume de boss de la cellule recrutement. Il pourrait incarner l’avenir et le renouveau d’une institution à laquelle il sera toujours resté fidèle.
De team manager à patron de la cellule recrutement. L’été prochain, mais sans doute avant dans les faits, Aurélien Rougerie débutera une nouvelle vie dans son club de toujours. Il deviendra moins visible du public et de l’environnement du club, mais son rôle, en coulisses et plus en profondeur, aura une tout autre épaisseur puisque de la réussite d’un recrutement peut dépendre le résultat d’une saison.
Fort de son expérience, débarrassé aussi peut-être un peu du « syndrome de l’imposteur » (peur de ne pas être à la hauteur), l’ancien capitaine de l’ASM semble prêt à jouer un rôle majeur au cœur d’un club qu’il souhaite remettre à sa place sur la carte du rugby français.
Quel va être votre rôle exact dans cette fonction de patron de la cellule recrutement ?
Cela va des plans de succession des plus jeunes jusqu’aux joueurs professionnels, en collaboration avec chaque coach de toutes les catégories. Aujourd’hui, il faut déjà parer au plus pressé et boucler tout le boulot que l’on fait depuis six mois sur le recrutement de la saison prochaine.
Derrière, ce sera la mise en place d’un process de recrutement qui a clairement été identifié. À ce propos, j’avais travaillé là-dessus, il y a quelques années, mais mon job n’avait pas trouvé écho à la direction du club à cette époque. Il est ressorti du placard, a été amélioré et complété, à moi maintenant de le mettre en application. Après, ce process est une trame, rien n’est figé et il n’est pas interdit de s’adapter.
« La Cité du rugby sera un élément moteur »
Êtes-vous d'accord pour dire que l’ASM n’est plus aussi attractive qu’à une époque ?
Mais ça l’a toujours été ! Il n’y a jamais eu la mer à Clermont, ni les grandes stations de sport d’hiver… Par contre, on essaie de jouer sur nos atouts qui sont nombreux, même touristiques et géographiques. Je dis souvent que Clermont n’est pas au milieu de rien, mais au centre de tout.
Quant à l’attractivité sportive, en effet, elle est moindre sur le plan des résultats. On a quand même des infrastructures de grande qualité, mais il faut reconnaître qu’elles sont moins innovantes et à la pointe qu’il y a une dizaine d’années.
Que faire alors ?
Déjà, nous avons un projet d’envergure, la Cité du rugby qui doit participer à notre attractivité. C’est un projet précurseur, dans le cadre du « One ASM » qui sera bientôt là (ndlr : ouverture prévue à l’été 2026) et qui sera un élément moteur, notamment dans le recrutement des jeunes et pour le centre de formation.
L’ASM est-elle condamnée à miser énormément sur sa formation pour retrouver les sommets ?
Pourquoi condamnée ? Au contraire, c’est extrêmement valorisant de former des jeunes, de les accompagner pour en faire des joueurs pros de haut niveau. Quoi de plus excitant que de relancer l’école montferrandaise qui a porté ses fruits longtemps ? Je ne dis pas que le travail était mal fait ces dernières années, mais on ne s’est peut-être pas suffisamment renouvelé.
Qu’est-ce qui manque aujourd’hui à votre club pour attirer à nouveau des joueurs de très haut niveau ?
Il faut peut-être que l’équipe retrouve un peu son rugby, son envie… ce qui nous manque parfois.
Un peu plus de salary cap aussi ?
On parle toujours d’argent, de moyens, de JIFF… on a compris les règles, on sait que l’on ne peut pas réaliser tout ce que l’on voudrait. Moi, j’ai aussi envie de parler de rugby, de jeu et de passion. Alors oui, on a encore des contraintes de salary cap, mais l’ASM a des atouts à mettre en avant.
Ce nouveau poste va-t-il vous plaire vraiment ?
Il m’excite ! J’ai envie d’apporter au club, je suis au service de l’institution et il y a plein de choses à accomplir. Franchement, tout cela est très motivant. Chez les pros comme chez les jeunes. Je suis père de famille de jeunes joueurs, ça me plaît d’aller à la rencontre des parents, de trouver la bonne approche pour tenter de les convaincre de venir chez nous.
Vous n’êtes pas au cœur du sportif, mais quelle analyse faites-vous de ce début de saison de l’équipe de Christophe Urios ?
Mon expérience me pousse à dire, et je le répète souvent, que lorsque ça va mal, tu fais le dos rond, tu travailles deux fois plus et tu te remets en question. Sur le jeu, dans un premier temps, tu te recentres sur des choses simples, tu les répètes à l’entraînement pour bien les exécuter en match.
Et ce problème à l’extérieur où l’équipe n’y arrive pas ?
Il faut trouver un guide et afficher de l’envie. Tout de suite, on n’a pas ça, mais je suis convaincu que Christophe (Urios) et le staff vont trouver la solution. La réalité est que ça travaille bien, vraiment, mais on prend des roustes à l’extérieur. Il faut continuer à y croire.
Comprenez-vous également l’impatience de vos supporters ?
Est-ce que ça prend plus de temps que prévu ? C’est possible, mais je vois aussi un mal de notre société qui est celle de l’immédiateté. Parfois, il faut construire ou reconstruire en prenant le temps de bien le faire. À l’ASM, on sait ce que c’est de travailler longtemps pour toucher le Graal.
La polémique : Urios - O’Connor
Le tweet publié le week-end dernier par l’ancien joueur Marvin O’Connor, insultant Christophe Urios et prétendant que « pas un seul de tes soldats ne peut te piffrer », est considéré par Aurélien Rougerie comme un non-événement. « Un coach a-t-il déjà fait l’unanimité ? Ici ou ailleurs. Je peux vous dire qu’à l’époque de Vern Cotter tous les joueurs n’étaient pas derrière lui… Dans un effectif, il y a toujours des mecs qui vont être aigris, surtout ceux qui ne jouent pas ».
Christophe Buron