Ancien préparateur mental de l’ASM Clermont Auvergne, où il a connu un titre de champion de France en 2017, Denis Troch est toujours dans le monde de la psychologie sportive et a accepté d’évoquer les conséquences de la blessure d’Antoine Dupont.
Entraîneur du PSG champion de France en 1994 et depuis reconverti dans le coaching mental qui l’a amené à travailler dans le rugby avec l’ASM, Denis Troch ne voit pas d’un très bon œil toute l’agitation médiatique autour du cas Antoine Dupont depuis sa blessure face à la Namibie. Explications.
Que vous inspirent la blessure d’Antoine Dupont et les doutes qui entourent sa présence pour la suite de la Coupe du monde ?
Sportivement, c’est évidemment une très mauvaise nouvelle pour lui, déjà, pour ses coéquipiers, pour l’équipe de France mais aussi pour la nation tout entière. Mais ça, en fait, ça ne compte pas. Enfin, ça ne doit pas compter parce qu’un simple joueur ne peut pas porter sur ses simples épaules l’avenir d’un pays. Ça ne doit pas fonctionner comme ça.
C’est-à-dire ?
La décision de sa présence ou non sur le terrain doit être prise par le staff médical et le joueur mais en aucun cas par le staff sportif. Ce serait impensable d’imaginer les entraîneurs mettre la pression sur le joueur pour qu’il reprenne s’il n’est pas entièrement à 100 %.
"Personne doit exiger ou forcer son retour. Au PSG, j’ai eu ces cas de figure à plusieurs reprises. Si le joueur avait le feu vert médical mais qu’il me disait n’être qu’à 90 %, je ne le faisais pas jouer. Tu ne peux pas mettre l’intégrité physique d’un de tes joueurs en sachant ça. Et ce, même s’il en va d’un titre de champion du monde. Surtout au vu de la blessure de Dupont."
Toutes ces spéculations autour du retour possible, ou non, d’Antoine Dupont, peuvent-elles avoir des répercussions sur le reste du groupe ?
Dans un vestiaire, qu’importe le sport, la pire des choses est de dépendre d’une seule et unique personne parce que c’est un aveu de faiblesse. Bien sûr que le XV de France a besoin d’Antoine Dupont mais s’il ne peut pas jouer, il faut tout faire pour mettre celui qui va le remplacer dans les meilleures conditions. Il faut valoriser et mettre en confiance le joueur. Pour lui, évidemment, mais aussi pour le groupe. Les joueurs ont besoin de se projeter sur la suite des événements.
Ce n’est pas le cas actuellement ?
Pour bien connaître plusieurs joueurs du groupe, aucun ne pense que si Dupont ne joue pas le quart de finale, la France va sortir. Aucun. Mais à force de ne se focaliser que sur le capitaine, de s’interroger uniquement sur les conséquences de son absence ou savoir si ses remplaçants seront au niveau, ou pas, il peut se créer un certain climat de peur.
Chez les supporters, les observateurs et, indirectement, sur les joueurs. La pire chose à faire dans ces moments, c’est d’installer un climat de peur. C’est difficile à mettre en place mais il faut essayer de minimiser au maximum l’impact psychologique de la blessure d’Antoine Dupont.
Entretien réalisé par Benjamin Pommier (La Montagne)