EDF de Galthié
#8656
Posté 04 octobre 2023 - 07:43
Y'en a marre des textes qui commencent par "Dupont a mangé/couru/pissé/joué aux cartes..."
- steph aime ceci
#8657
Posté 04 octobre 2023 - 07:57
Le jeu au pied de l'EDF est certes très souvent efficace, mais génère en moi beaucoup de frustrations lorsque je regarde les matchs.
Sur le jeu long, le plus souvent ça passe, et c'est vrai que l'équipe est très forte dans ce domaine, mais sur le jeu au pied court de nos centre, ou des ailiers... ça a tendance à me gaver car on bousille souvent des actions à plusieurs temps par manque de patience, ou par erreur tactique...
Le juge de paix restera le 1/4... puis l'éventuelle demie etc...
#8658
Posté 04 octobre 2023 - 20:07
Les secrets des lunettes de Fabien Galthié Les lunettes du sélectionneur de l'équipe de France sont devenues mondialement célèbres. Une marque française, familiale, les fabrique. Son fondateur a été un pionnier de la plongée sous-marine pour tous dans les années 1950.
[...] Des ventes multipliées par six depuis le début de la Coupe du monde
Avec une telle exposition planétaire, l'ancien meilleur joueur du monde (en 2002), aujourd'hui âgé de 54 ans, pourrait espérer un contrat de sponsoring à plusieurs zéros. Mais voilà, en tant que sélectionneur de l'équipe de France, il doit s'astreindre à une sorte de devoir de réserve publicitaire et s'interdit tout contrat personnel.
« De toute façon, nous n'aurions pas assez de budget com' pour rétribuer Fabien », sourit Gilles Demetz, le directeur général d'Opal Demetz. « Nous sommes une marque française, familiale, qui compte vingt-huit employés. Mon père l'a lancée en 1950. Il a d'abord ouvert un magasin à Gannat, dans l'Allier, puis à Paris, dans le XIIe arrondissement. »
Décédé en 2016, à l'âge de 93 ans, Roger Demetz, le père de Gilles, a aussi été l'un des pionniers de la plongée sous-marine en France. « Il a travaillé et plongé avec le commandant Cousteau », raconte fièrement son fils. En 1951, Demetz senior marie sa passion et son métier en inventant le premier masque de plongée à correction optique. Ceux qui trouvent que les lunettes de Fabien Galthié ressemblent à l'accessoire indispensable des hommes-grenouilles n'ont donc pas complètement tort. « Nous sommes des spécialistes des lunettes de sport, de presque tous les sports. Nous présentons plus de deux cents modèles. » Dont le désormais fameux ROS 21 de Fabien Galthié, toujours au catalogue, pour 115-120 € la paire. « Depuis le début de la Coupe du monde, les ventes de la ROS 21 ont été multipliées par six ! Nous en avons encore 300 en stock. »
Elle constitue juste une parenthèse enchantée que Gilles Demetz ne se lasse pas de raconter : « Ce qu'il apprécie dans nos lunettes, c'est bien sûr leur solidité, car elles sont presque incassables. Mais il nous a aussi confié que la protection latérale assez épaisse lui permet de mieux se concentrer, comme s'il était dans une bulle. » [...]
Merci d'avoir partagé cet article nous apprenant à la fois l'histoire des masques de plongée à verres correcteurs et aussi partageant l'origine auvergnate de la marque !
Je me doutais qu'il ne voyait rien sur les côtés ! Ce qui est un peu flippant... ça peut ralentir les réflexes de conduite, du fait d'être obligé de tourner la tête.
#8659
Posté 04 octobre 2023 - 20:24
Le rugby est une affaire de famille chez les Ollivon-Lucu. Comme leurs pères et leurs frères, Charles et Maxime ont d'abord joué ensemble à Saint-Pée-sur-Nivelle (Pyrénées-Atlantiques). C'est dans ce joli village basque qu'ils ont pris très jeunes leurs premières licences. Et c'est là aussi que les deux internationaux ont construit une solide amitié, sur le terrain et en dehors. Vingt-cinq ans plus tard, le troisième-ligne du RCT, promu capitaine contre l'Italie demain soir (21 heures) à Lyon, et le demi de mêlée de l'UBB disputent aujourd'hui une Coupe du monde en France sous le maillot tricolore. Réunis en août dernier en marge du stage de préparation des Bleus à Capbreton, les deux comparses avaient accepté de revenir longuement sur leurs souvenirs communs et leur bonheur de partager ces moments tous les deux.
« Avez-vous des souvenirs précis de vos premières rencontres ?
Maxime Lucu : Non, pas spécialement, mais son frère et le mien jouaient ensemble à l'école de rugby. Même si on n'avait pas l'âge de jouer, on venait quand même le samedi matin. Son père était éducateur, et moi je venais avec mon frère et mon père. On a alors commencé à se côtoyer. On était les deux de 1993. Et quand on a eu 5 ans, on a signé notre licence.
Charles Ollivon : Le dimanche, on allait voir l'équipe première. Le stade n'était pas comme aujourd'hui. Il y avait de vieux vestiaires pourris et un bac à sable au bout. Après on allait à la Nivelle (le cours d'eau) qui passe derrière le stade. À chaque fois, on revenait tout pourris parce qu'on allait dans le ruisseau.
M.L. : Et si tu ramassais les poteaux à la fin, tu avais un sandwich à la ventrèche !
À quoi aspiriez-vous alors ?
M.L. : Le rêve pour nous à ce moment, c'était de jouer là, d'avoir le maillot de Saint-Pée. Jamais de la vie on ne s'était dit qu'on allait jouer un jour en équipe de France.
C.O. : Max a vu son frère grandir et voulait faire pareil. La même chose pour moi. Tu veux suivre. Après on a grandi et on a vécu plein de trucs. Je me souviens de notre première bagarre ! (Rire) On a vraiment grandi ensemble.
Vous êtes aussi allés ensemble au catéchisme. Qui était le plus assidu ?
M.L. (il explose de rire) : Au "cathé", on grugeait un peu, même s'il ne faut pas trop le dire. On restait cachés.
C.O. : On a fait tellement de bêtises ensemble au rugby et en dehors ! J'espère que les gamins s'amusent autant qu'on s'est amusés.
M.L. : Au début, Charles vivait à Ustaritz. On n'était pas encore à l'école ensemble. Mais après c'était tout le temps, le week-end, la semaine, le catéchisme. Avec notre groupe de copains, on se voyait quasiment du lundi au dimanche.
Certains affirment que Charles est le plus déconneur des deux...
C.O. : Non, ce n'est pas vrai ! (Il se marre.)
M.L. : Il me fait rire et il le sait. Je suis très bon public.
C.O. : En cinquième, tu te rappelles quand on est allés aux casiers ? On se mettait des bouchons ! (Il explose de rire.) On avait des casiers tout au fond de la classe. Dès qu'un cours était terminé, on fonçait à une dizaine et on se jetait dans les cartables. On prenait cinq mètres d'élan, on se rentrait dedans et on tombait sur tous les sacs. Lui (Maxime), il a ramassé !
M.L. : Tu vois la scène, tu te dis "c'est des débiles" ! Moi, j'étais toujours en bas, pareil dans les bagarres. C'est l'histoire de ma vie (rire). Je ne pouvais pas me venger car ils étaient plus costauds. Pour la confirmation et la classe de cinquième, on a atteint le summum ! C'était connerie sur connerie. On commençait un peu à aller aux fêtes de villages, aux autos tamponneuses. De septembre à juin, c'était n'importe quoi. Les soirées à Irun (Espagne), c'est arrivé un peu plus tard, vers 17-18 ans. Avant, on n'avait pas trop le droit de sortir. On s'est bien rattrapés depuis. Pour ça, on a de l'imagination.
« Quand je le regardais dans les vestiaires, j'avais un peu de mal à réaliser. On est forcément fier et on pense à beaucoup de choses, aux gens du village. »
Maxime Lucu, évoquant sa première titularisation en Bleu avec Charles Ollivon
Partager cette carrière internationale après tout ce que vous avez vécu n'est pas anodin...
C.O. : Ah non, ça c'est sûr ! On a beaucoup de chance.
M.L. : C'est fort de se retrouver là. Quand j'ai fait mes premiers pas en équipe de France, Charles était blessé (Lucu a fait ses débuts internationaux en novembre 2021 alors qu'Ollivon était touché à un genou). Mais après j'ai vécu des moments forts lorsque l'on a fait la tournée ensemble au Japon (été 2022). On se dit : "Putain, mais y a vingt-cinq ans, on était ensemble". Parfois, tu ne réalises pas forcément, mais quand tu prends du recul, c'est génial pour nous mais aussi pour les gens autour de nous qui sont forcément fiers.
Cette première titularisation commune, le 2 juillet 2022 au Japon, a forcément été un moment à part...
C.O. : Oui, ce sont des choses qui restent. Pour la Marseillaise, on était ensemble. C'était fort sur le moment et peut-être encore plus après. Ça a forcément fait remonter des souvenirs d'enfant. On est chanceux de pouvoir le vivre. À ce moment-là, tu penses à faire ton match mais tu te dis aussi : "Putain, ce n'est pas pareil aujourd'hui, il y a un truc en plus difficile à décrire." C'était un vrai moment marquant.
M.L. : C'est sûr que c'est un bon souvenir. Déjà, c'était ma première titularisation (victoire 43-22 des Bleus). Quand je le regardais dans les vestiaires, j'avais un peu de mal à réaliser. On est forcément fier et on pense à beaucoup de choses, aux gens du village. Il y a aussi cette histoire de destin. Ce jour-là, c'était les fêtes de Saint-Pée. Je recevais des messages avant le match de copains qui disaient : "On va essayer de tenir, c'est énorme." (En raison du décalage horaire).
Quelques mois plus tard, toujours face au Japon (35-17) mais à Toulouse, Maxime, vous servez Charles qui va marquer un essai...
M.L. : Charles sent souvent ces coups-là. Et face aux Japonais, quand je fais le crochet et que j'entends sa voix, je savais qu'il était là. Je savais que j'avais juste à lui donner le ballon. Mais c'est vrai qu'à ce moment, il n'y avait pas plus grande fierté que de pouvoir donner ce ballon à Charles pour qu'il aille marquer. C'était symbolique. Dans l'autre sens, ça arrivera rarement parce que je ne marque pas beaucoup d'essais.
La présence de l'autre est-elle rassurante en équipe de France ?
M.L. : C'est sûr que tu débarques en équipe de France, tu prends appui sur des mecs comme lui. Et pas uniquement parce que c'est Charles. Il était capitaine de l'équipe de France quand je suis arrivé. Tu te réfères un peu à lui, c'est humain. Ça me rassurait aussi qu'il soit là, de par son poste mais aussi parce que c'est lui.
C.O. : C'est rassurant quand on est ensemble. Tu es tranquille sans le dire. Tu as toujours un petit truc quand tu vas en équipe de France, parce que c'est le plus haut niveau, avec une forme de pression. Et quand on y est tous les deux, il y a cette forme de tranquillité, parce qu'il est là, parce que je suis là.
« Pour moi, Max, ce n'est pas un mec de mon équipe, c'est un copain du village »
Charles Ollivon
En sélection, vous vous êtes finalement redécouvert...
C.O. : On s'est suivis, on a tout fait ensemble. Puis la vie a fait qu'on a pris des chemins différents. Moi, je suis parti à Bayonne (2009-2015). Lui à Biarritz (2011-2019 en seniors). Et après je suis allé jouer à Toulon, de l'autre côté de la France. Mais ça ne change rien. Et dans dix ans, ce sera pareil. Pour moi, Max, ce n'est pas un mec de mon équipe, c'est un copain du village.
M.L. : Même s'il est parti à Toulon, on essaie toujours d'avoir un week-end ou une soirée en commun pour se retrouver avec les mecs du village. On a essayé de garder ce lien même si c'est difficile de se voir avec la distance.
Vous ne vous fatiguez jamais dans la chambre que vous partagez régulièrement en sélection ?
C.O. : Non, franchement, il est facile. Il me casserait les pieds s'il laissait la télé allumée jusqu'à trois heures du matin. Mais on est pareils, c'est vrai non ?
M.L. : C'est vrai, oui, on est pareils. En plus, il ne ronfle pas, alors que moi je parle la nuit et je le réveille (rire). On n'a pas des caractères à traîner toute la nuit. On discute, on rigole des conneries, mais c'est tout. On a aussi des affinités avec d'autres joueurs du groupe. On n'est pas non plus tous les deux main dans la main. »
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#8660
Posté 04 octobre 2023 - 20:43
Pour le tournoi ça va le faire.
#8661
Posté 04 octobre 2023 - 21:38
#8662
Posté 05 octobre 2023 - 05:50
C'était l'une des grandes questions de cette première moitié de Coupe du monde. Une interrogation surgie au coeur du mois d'août, juste après l'officialisation du forfait pour la Coupe du monde de Romain Ntamack, victime d'une rupture du ligament croisé antérieur du genou gauche face à l'Écosse (30-27), en match de préparation : Matthieu Jalibert (24 ans, 29 sél.), si naturellement porté vers l'attaque, si prompt à saisir la moindre opportunité pour se faire la belle dans les lignes adverses, saurait-il se glisser aussi facilement que le Toulousain dans la peau d'un ouvreur sobre et gestionnaire ? D'un métronome capable de coller à la perfection au jeu de dépossession et de repossession prôné par Fabien Galthié et son encadrement ?
Au regard du tempérament du bonhomme, un doute subsistait. Il faut dire que Ntamack et Jalibert, ce sont un peu la glace et le feu, deux profils très différents, presque opposés. Alors ? « Je ne changerai pas ma façon d'être ni de jouer », observait le Bordelo-Béglais avant le début de la compétition.
Les premiers matches de ce Mondial montrent que ce n'est pas tout à fait vrai. Si Jalibert n'a pas radicalement changé, ce qui aurait été une grosse bêtise, il s'est au moins adapté au jeu des Bleus. Les chiffres d'Opta, qui prennent en compte tous ses matches depuis juillet 2022 en équipe de France et avec l'UBB, l'attestent aussi. Déjà, le joueur touche en moyenne moins de ballons en 80 minutes en sélection qu'avec son club (31,1 contre 39,5), ce qui tend à confirmer que le numéro 10 est culturellement moins le patron chez les Bleus que le numéro 9, surtout quand ce dernier s'appelle Antoine Dupont.
Ensuite, Jalibert tape plus au pied en équipe de France (33,9 % des ballons touchés) qu'avec l'UBB (28,1 %), preuve qu'il respecte les consignes d'un staff qui a fait du gagne-terrain au pied l'une de ses stratégies préférentielles. « Matthieu est en train de montrer un visage plus mature que les années passées, estime l'ancien entraîneur des trois-quarts puis manager de l'UBB Rory Teague, avec lequel il est resté très proche. Il sait que c'est très important de bien gérer le jeu. Alors, il reste vraiment dans le système et fait jouer les autres. »
« Matthieu est un joueur de niveau international, c'est donc quelqu'un qui sait s'adapter, ajoute son ami demi de mêlée Maxime Lucu, avec lequel il fera la paire à la charnière face à la Nazionale, vendre soir (21 heures). On lui demande de faire des choses et il les fait parfaitement. Il répond aux attentes du staff. »
« Je sais très bien qu'il y aura une ou deux situations dans le match où il tentera un truc, et ça sera très bien, et d'autres fois où il faudra peut-être le freiner »
Maxime Lucu
La mue n'est pourtant pas totale. Il arrive encore parfois, et c'est humain, que Jalibert outrepasse une consigne pour tenter le coup en solo que personne n'a vu venir, ses partenaires y compris. « Je connais très bien Matthieu, poursuit Lucu. Parfois, il faut le canaliser. C'est la même chose à l'UBB. Il est comme ça, je sais très bien qu'il y aura une ou deux situations dans le match où il tentera un truc, et ça sera très bien, et d'autres fois où il faudra peut-être le freiner parce que des choses sont demandées, qu'on a une stratégie à respecter collectivement. Mais Matthieu prend de l'expérience au fur et à mesure, il sait de mieux en mieux ce qui est dangereux pour l'équipe. »
L'ouvreur sait aussi qu'il n'est qu'un talent parmi d'autres en équipe de France, alors qu'il est le maestro à l'UBB, le joueur dont ses coéquipiers, ses entraîneurs et le public attendent la fulgurance ou le geste qui terrassera l'adversaire. « À Bordeaux, c'est lui le chef, reconnaît Teague. C'est lui qui gère tout ce qui se passe autour de lui. En équipe de France, en revanche, il a quelques-uns des meilleurs joueurs du monde autour de lui. Du coup, il laisse aussi aux autres le soin de gérer le plan de jeu et de faire des choix. Il n'a pas besoin d'en faire trop parce que les responsabilités sont davantage partagées. »
« On sait qu'il est capable de faire des exploits, mais il a aussi beaucoup mûri dans la conduite du jeu. C'est un joueur capable de changer le cours d'un match »
Laurent Labit
Jalibert reste quand même Jalibert. Un joueur imperméable à la pression qui va tenter ce petit coup de pied par-dessus pour lui-même dans le dos du défenseur s'il voit l'espace devant lui, ou qui va donner ce coup de reins et cette passe laser létale pour déséquilibrer l'adversaire et offrir un essai en coin à Damian Penaud, comme lors du match d'ouverture face à la Nouvelle-Zélande. Les chiffres disent d'ailleurs aussi que, même s'il touche moins de ballons en équipe de France, il y est tout aussi efficace en attaque qu'avec l'UBB, et même un peu plus puisqu'il y casse plus souvent la ligne adverse.
« Il fait les bons choix tout en gardant ses qualités habituelles, c'est-à-dire franchir la ligne et créer des exploits », dit encore Teague. « Matthieu est là où on l'attendait, il a su prendre le relais (de Romain Ntamack), ajoute Laurent Labit, le responsable de l'attaque tricolore. On sait qu'il est capable de faire des exploits, comme il l'a fait face aux All Blacks, mais il a aussi beaucoup mûri dans la conduite du jeu. C'est un joueur capable de changer le cours d'un match. »
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#8663
Posté 05 octobre 2023 - 22:06
Ça se voit à son jeu, Maxime Lucu ne se prend pas pour un autre. Cette nature est ressortie face aux micros mercredi, quand il a été invité à parler de son remplacement d'Antoine Dupont. « La comparaison ne peut pas être possible, c'est le meilleur joueur du monde », a posément dit le Basque, qui va vivre sa sixième titularisation.
Lors des précédentes, on a vu que la stratégie des Bleus ne variait pas selon que Dupont ou Lucu était aux commandes. « Notre stratégie, nos circuits, nos lancements, ce n'est pas autour d'une personne », soulignait Grégory Alldritt mercredi. Mais d'un « 9 » à l'autre, la manière de les faire vivre est très différente.
Maxime Lucu (17 sélections) a inscrit un essai avec l'équipe de France, lors de la tournée au Japon de l'été 2022. Mais il a été refusé à cause d'un déblayage illégal dans le dernier ruck. Son compteur est donc toujours bloqué à zéro, ce qui ne fait pas de lui un cas rare chez les numéros 1 (Morgan Parra a attendu sa 26e cape pour marquer) mais souligne l'écart d'efficacité individuelle avec Antoine Dupont (13 essais en 51 sélections, 3 après 17 capes).
Lucu (30 ans, 1,77 m, 82 kg) ne possède ni la vitesse qui sert à Dupont (26 ans, 1,74 m, 86 kg) pour se projeter au soutien, ni la force qui lui sert à gagner des duels décisifs. Par ailleurs, selon Opta, Lucu n'a adressé aucune dernière passe avant franchissement, contre 26 à Dupont (depuis 2020). Face à l'Italie, cette capacité du Toulousain à servir de finisseur ou de détonateur pourrait manquer. « Aux quatorze autres d'élever aussi leur niveau de jeu de 5 ou 10 % pour faire face à son absence », a glissé Alldritt.
Puncheur, marqueur d'essais, Antoine Dupont tranche avec la définition classique du demi de mêlée. Maxime Lucu, lui, en est l'archétype. Organisateur, stratège, « très altruiste », comme l'a résumé Fabien Galthié. En gros, quand Dupont fait parfois pour les autres, Lucu laisse le plus souvent faire les autres. Avec des passes simples, sans forcer sa nature.
En bleu, depuis 2021, il n'a couru avec le ballon que sur environ 5 % des munitions qu'il a touchées, contre environ trois fois plus à Dupont (14,1 %). Le fait que l'on retrouve ce même ratio d'un pour trois concernant les duels gagnés (0,9 par 80'jouées pour Lucu, 3,1 pour Dupont) est un signe que le Bordelais est assez fin dans ses choix et dans sa manière d'affronter la défense, beaucoup plus chaloupée que le Toulousain.
Globalement, l'économie de gestes semble le guider. Derrière un ruck rapide, il ramasse et passe dans le même geste, opte pour une passe poignet quand une « vrillée » lui ferait perdre du temps, ne cherche pas à tout prix le coup gagnant. Pour son jeu au pied, deux pas lui suffisent. Et si ses cuisses ne sont pas grosses, le ballon part loin.
Mercredi, Galthié a qualifié le jeu au pied de Lucu « d'exceptionnel ». C'est son point commun majeur avec Dupont, et c'est sans doute la raison principale de son statut de numéro 2. Quand il entre en jeu ou démarre un match, Lucu permet, avec sa longueur, de maintenir la stratégie de dépossession chère aux Bleus, et de continuer à la faire tourner autour du numéro 9. Les statistiques disent que Lucu tape plus fort (33,5 m par coup de pied, contre 27,2 à Dupont), mais l'analyse amène à pondérer fortement.
Car, avec les Bleus au moins, Lucu varie moins souvent ses formes de jeu au pied que Dupont : des dégagements et des « boxkicks » (chandelles du demi de mêlée), mais aucune transversale et aucun petit par-dessus, ces jeux au pied qui gagnent moins de terrain. Un fait qui souligne à nouveau la différence de style entre les deux joueurs, l'un qui cherche à faire des différences, l'autre qui limite les prises d'initiative.
#8664
Posté 06 octobre 2023 - 06:06
Kolopa Mauvaka avait beau multiplier les heures de soutien scolaire, rien à faire : à l'école, son fils Peato n'y arrivait pas. « On est cinq frères et soeurs, j'étais le seul à avoir des difficultés, confie le talonneur des Bleus. Je me sentais à l'écart. » Un enseignant conseillera le sport pour canaliser ce collégien turbulent. Kolopa, la maman du joueur de l'équipe de France, en sourit encore : « Après la séance, le prof m'a dit : "Mon Dieu, j'ai cru lâcher un fauve !" Le terrain n'était pas assez grand pour lui. »
Chez les Mauvaka on dit que Peato, 26 ans, ressemble à son aïeul Peletano, « Un homme fort qui n'avait peur de rien, assure Kolopa. Mon grand-père a été roi de Wallis de 1941 à 1947, son nom était Pelenato Pulufegu Fuluhea. C'est lui qui avait remis la lettre de demande de protectorat au général de Gaulle. »
Le joueur a ancré en lui la fierté de ses racines. « Je suis à 100 % Wallisien, même si je suis né à Nouméa, où mes parents étaient venus travailler », assure-t-il, le menton levé. Il était moins fier quand ses bulletins de notes arrivaient dans la boîte aux lettres. Aux yeux de Kolopa, le savoir est une arme. Forte de son instruction et de son caractère, elle avait su s'affranchir des pesanteurs de la tradition wallisienne, verticale et patriarcale. « J'ai quitté le manou (paréo), osé porter un pantalon », ironise celle qui est devenue comptable, un métier qui pèse aux yeux des hommes.
Son rêve ? « Partir en Métropole, devenir volleyeur professionnel comme Christopher Suve, un grand du quartier qui jouait à Avignon. »
Issue d'une noble lignée, Kolopa a connu le déclassement. Dans les années 1960, le boom économique provoqué par la découverte du nickel en Nouvelle-Calédonie a engendré une immigration massive de Wallisiens vers Nouméa, à 2 000 kilomètres de leur île. C'est l'histoire des Mauvaka, installés à Katiramona, au coeur des terres montagneuses d'où l'on ne voit pas la mer. « Le père de Peato quittait la maison à trois heures du matin, raconte Kolopa. Il faisait le trajet en covoiturage, pour aller extraire le nickel à la pioche dans les mines de Tiebaghi, au nord de la Nouvelle-Calédonie. »
C'est dire si Kolopa s'inquiétait de l'avenir de Peato. Lui se désolait de la décevoir, mais s'agrippait à une conviction : « J'étais fort dans tous les sports ! » Il pratiquait le karaté et le volley. Nourrissait un rêve : « Partir en Métropole, devenir volleyeur professionnel comme Christopher Suve, un grand du quartier qui jouait à Avignon. Quand il revenait, on était scotchés près de lui, à demander "C'est comment la France ?" »
En octobre 2011, Peato avait 14 ans et regardait à la télé la Coupe du monde de rugby avec son père et ses frères. L'événement se déroulait à trois heures d'avion de Nouméa, en Nouvelle-Zélande. « On était fans des All Blacks, l'équipe préférée de papa. Pendant le haka il était absorbé, la pièce plongée dans le silence. C'était l'époque de Sonny Bill (Williams), le beau gosse polynésien qui enchaînait les passes après contact. »
Un lundi, un des frangins Mauvaka est invité par un pote de lycée à un entraînement de rugby. « Yvan-Karl a trois ans de plus que moi, mais on est comme des jumeaux, raconte Peato. Alors, je l'ai accompagné. » Direction Dumbéa, une ville de 35 000 âmes avec une forte densité de Wallisiens, dans la banlieue nord de Nouméa.
Peato assistera à l'entraînement depuis le bord du terrain : « Le rugby, ce n'était pas mon truc. » Il changera d'avis en apprenant qu'un « recruteur » venu de France assiste à la séance et doit revenir le mercredi suivant. « C'était l'occasion unique de me faire remarquer. Sauf que je ne pouvais plus bouger la main. J'avais une plaie depuis des jours qui s'était infectée. J'ai pris un chiffon et retiré la croûte. La blessure était dégueulasse, pleine de pus. J'ai mis de la Bétadine, je me suis fait un pansement. Et j'ai serré les dents. »
Hop ! Fort de ses 70 kg, l'ado s'est incrusté à l'entraînement des seniors. « Il n'y avait que des hommes mûrs, des golgoths de 100 kilos ! Forcément, j'ai joué dans l'évitement. Pour ne pas me faire exploser, je me débarrassais vite du ballon. Ce soir-là, je ne sais pas pourquoi, tout ce que je faisais fonctionnait : des feintes de passe sans le faire exprès, des deux contre un ! »
Virtuose improvisé, il tape dans l'oeil d'Abraham Tolofua, ancien pilier finaliste du Championnat de France avec Clermont, en 2001. Le Wallisien est en mission d'observation pour Gérard Labbe, président de l'Association du Stade Toulousain. Tel un prophète, Abraham va percevoir ce que les autres ne voient pas. « Quelque chose de puissant émanait de ce garçon, sa démarche, son attitude. » Tolofua questionne autour de lui : « Mais c'est qui, ce petit ? » Personne ne lui répond. Il interroge le président du club, les entraîneurs : « D'où il sort, d'où il vient ? » Tous me répondaient : « Mais, Abraham, il n'a jamais joué au rugby, ce gosse. Il n'est même pas inscrit chez nous. Ils ne comprenaient pas pourquoi j'avais flashé sur lui. Ils m'ont pris pour un fou ! »
« Mon père est toujours là, je sens sa force en moi. »
Peato Mauvaka au sujet de son père, décédé fin 2018
Tolofua téléphone illico à Labbe. « Gérard, j'ai trouvé la pépite ! » Le lendemain, il prend la route à lacets qui monte à Katiramona. « Je me suis présenté chez ses parents dès 8 heures du matin. Sa mère m'a écouté en silence. Elle me regardait avec cette distance que les femmes de Wallis savent imposer dans le regard. Je n'en menais pas large. Puis elle a dit : "C'est impossible. Mon fils n'a que 14 ans, qu'avez-vous vu de si spécial en lui ? Il ne fait même pas de rugby et voilà que vous tombez du ciel pour nous le prendre ? "Je suis devenu tout pâle. »
Soane Patita, le père, homme de peu de mots, a temporisé en homme sage : « Laissez-nous le soin de nous concerter. Nous vous donnerons une réponse avant votre retour en France. » Déconfit et dépité, Tolofua s'en est allé. À peine rentré à Nouméa, un coup de fil lui enjoint de remonter à Katiramona. Kolopa s'était ravisée. « J'en avais pleuré toute la nuit, avoue-t-elle. Me résigner à ne plus voir mon fils ou bien briser son rêve ? »
Peato débarquera à Toulouse, à plus de 17 000 kilomètres des siens, le 22 janvier 2012. « En touriste, se marre le joueur, avec un short et des claquettes. Il faisait un froid glacial, je n'avais jamais vu de neige. » Il ne connaît rien des règles du rugby, ignore tout du palmarès du Stade Toulousain et s'apprête à pénétrer dans la cathédrale de l'Ovalie.
Il habite chez les Tolofua, sa famille d'accueil pendant quatre ans. « Au début, certains m'ont demandé "Mais d'où il sort ? Il ne connaît rien aux règles !", se souvient Tolofua. On y a cru. On a bossé. » Peato sera pris en main par les formateurs du Stade Toulousain, Nicolas Tranier et Joël Dupuy. Il jouera d'abord centre, puis troisième-ligne avant d'être repositionné talonneur. « Ce n'est pas son vrai poste, ça l'enferme », estime Tolofua.
Dix ans après avoir été repéré, Peato s'est retrouvé au Stade de France, avec les Bleus contre les All Blacks. C'était le 20 novembre 2021. Il sera le détonateur de la victoire de la France (40-25), inscrira un essai dès la 3e minute, un autre à la 32e. Ardent au combat, jamais timoré. Malgré le flot d'émotions durant la Marseillaise. « Je pensais très fort à mon père. » Celui-ci n'a jamais pu voir son fiston faire face au haka maori. Il est décédé brutalement, le 17 décembre 2018, d'une intoxication alimentaire. « Mon père est toujours là, je sens sa force en moi. »
Dans une pièce de la maison de Katiramona, Kolopa a dressé un autel en hommage à Soane Patita. Il repose là, souriant, sur une photo sépia adossée à son urne funéraire et à une brique du Stade Toulousain. Avant chaque match des Bleus, Kolopa le prévient : « Ton fils joue aujourd'hui. Il faut que tu sois là ! »
- xdderf63 et Lavande50 aiment ceci
#8665
Posté 06 octobre 2023 - 20:04
un de plus ....
#8666
Posté 06 octobre 2023 - 20:13
"La cathédrale de l'ovalie", ça a de la gueule quand même
#8667
Posté 06 octobre 2023 - 20:40
personne commente ou c est en panne ?
#8668
Posté 06 octobre 2023 - 21:48
personne commente ou c est en panne ?
Il existe un sujet dédié.
#8669
Posté 06 octobre 2023 - 22:14
Moefana en tant qu'impact player sortant du banc, ça semble une option intéressante. Il n'a pas (du tout) convaincu en tant que titulaire au centre, et l'aile n'est pas son métier. Mais il a vécu tout le long de l'aventure avec cette équipe Galthié, dont le Grand Chelem, et en sortant du banc, lui et ses jambonneaux de bison sont tous frais et ça fait mal quand t'as ça qui arrive à 10m de la ligne. Il galope, il est puissant...
#8670
Posté 07 octobre 2023 - 21:05
Bon le coup parfait, délicieux, serait que les All Blacks fassent peser leur pédigrée contre les Irlandais, et les fassent douter en contexte de quart de finale. Pour arriver à les taper, même d'un point. De l'autre côté les Bleus se farcissent les Boks mais étant à domicile passent quand même. Les Bleus passent en demi et se débarrassent facilement des Anglais ou Fidjiens. Et puis retrouvent les Blacks en finale, qu'ils dominent logiquement comme ils l'ont fait en Pool, malgré un match plus serré cette fois. Champions du monde pour la 1è fois. Impec, c'est parfait. Aller, affaire classée. Maintenant, la difficulté, c'est ce Six Nations 2024...
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