A. Williams avance pour faire reculer les Français et ceux-ci avancent au ras de la ligne pour montrer aux Blacks qu'ils sont là et bien là...
D'ailleurs, je n'ai jamais compris pourquoi maintenant on interdit aux adversaires des Blacks d'aller les défier les yeux dans les yeux lors du Haka !
Haka ou pas, on devrait pouvoir les défier de près, ce n'est pas un manque de respect, c'est juste pour leur montrer qu'on n'a pas peur d'eux.
Je ne sais pas s'ils le font encore mais après chaque haka les blacks vont attendre que leurs adversaires se replacent ou tournent le dos pour à leur tour aller se replacer.
Il y a un défi du regard en plus.
Je me rappelle des gallois y a 10 ans environ ou personne ne bougeait
Je ne sais pas s'ils le font encore mais après chaque haka les blacks vont attendre que leurs adversaires se replacent ou tournent le dos pour à leur tour aller se replacer.
Il y a un défi du regard en plus.
Je me rappelle des gallois y a 10 ans environ ou personne ne bougeait
Ce n'est pas le "pied" pour les retransmissions télévisées si le match commence avec 10 minutes de retard !
Toujours un petit mot gentil même quand tu faisais un match de merde.
"C'est pas grrrave petit, tu te rratrraperras la prochaine fois. On est bien d'accorrd tu le ferrras plus hein." Accompagné d'un grand sourire et d'une énorme main posée fermement sur l'épaule. Souvenir indécrottable.
Je ne le remercierai jamais assez de m'avoir sorti de ma cambrousse et de m'avoir permis de croiser la route de quelques pères de... et de chouettes joueurs.
Ville:UZERCHE mais originaire de RIOM et j'y tiens
Mon club:
Posted 30 November 2020 - 19:21 PM
Coste était de ce match!
oui, et il me semble que c'est lui qui embrasse Dominici dans l'enbut ,sur son essai de légende
Souvenez-vous du fameux Haka pour le 1/4 de finale de CDM en 2007 !
Ce jour-là, j'ai vu de la peur dans les yeux d'Ali Williams, il détourne son regard face à Dominici...
de la peur, faut pas exagèrer mais il semble effectivement déstabilisé
Oui, je te comprends ! Cependant à l'époque j'avais cru saisir, à travers les dires de certains, que la coutume ou la règle préconisait une distance ( ou un comportement ) à ne pas dépasser lorsqu'on allait à leur rencontre .
les gestes barrières avant l'heure, en quelque sorte
C'est clair, j’imagine qu'ils n'avaient pas les droits pour les commentaires de l’époque, mais sur ce genre de matchs c'est indispensable ! (et dieu sait que CJPierre est mauvais pourtant). La je me demande si cela n'a pas été re-commenté à la hâte suite au décès de C Dominici
imaginez un peu Roger Couderc
et magnifiquement réalisé. C'est légitime si l'arbitre ne fait pas son boulot.
c'est donc ça l'intelligence situationnelle chère à Villepreux
bien qu'il s'en défende lorsqu'il dit qu'il n'y avait pas de contrat sur Kronfeld
Décidément quand ça veut pas, .....
Les tristes nouvelles volent en escadrille ... Roger Fite
Pas de trace de produits stupéfiants dans les analyses de Christophe Dominici
Les analyses sanguines pratiquées sur l'ancien ailier n'ont pas révélé de traces de produits stupéfiants ou d'alcool dans son organisme au moment de son décès le 24 novembre. L'hypothèse d'une « bouffée délirante » n'est pas exclue.
Ils étaient attendus depuis plusieurs jours. Ils ont été dévoilés en fin de semaine dernière. Selon nos informations, les résultats des analyses toxicologiques réalisées après le décès de Christophe Dominici, l'ancien ailier du quinze de France, n'ont pas permis d'en apprendre plus sur les circonstances de sa mort. L'ex-joueur du RC Toulon et du Stade Français avait fait une chute mortelle de plusieurs mètres de haut, le 24 novembre, alors qu'il se trouvait à proximité du Domaine de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine).
Transmis au parquet de Nanterre, qui a ouvert une enquête préliminaire pour « recherches des causes de la mort », les résultats de ces analyses ont écarté l'hypothèse selon laquelle Christophe Dominici aurait pu être sous l'emprise de drogue ou d'alcool au moment de sa chute dans le vide. « Aucune trace de stupéfiants, ni d'alcool, ni de médicaments en dose élevée n'a été relevée dans son sang, confie une source proche de l'enquête. Des traces de médicaments, mais en concentration peu élevée, ont été retrouvées. ». Des résidus médicamenteux qui pourraient correspondre au traitement récemment prescrit au natif de Toulon (Var) alors qu'il s'était vu diagnostiquer un « état dépressif ».
« Il souffrait de trouble du sommeil, confie un proche de l'affaire. Il se disait notamment poursuivi par des hommes en uniforme et armés »
Un proche de l'affaire
Au fil de leurs investigations, les enquêteurs du commissariat de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine) ont mis en exergue que le vainqueur de cinq boucliers de Brennus avec le Stade Français avait été pris d'une « bouffée délirante » liée à un manque de sommeil quelque temps auparavant. « Il souffrait de trouble du sommeil, confie un proche de l'affaire. Il se disait notamment poursuivi par des hommes en uniforme et armés, qu'il assimilait à des policiers d'une brigade anticriminalité (BAC) ou des gendarmes de l'unité d'élite du GIGN. Le projet de reprise avorté du club de Béziers l'avait clairement marqué. »
Toujours selon nos informations, quelques instants avant de trouver la mort, l'homme aux 67 sélections en équipe de France avait été vu en train de monter sur le toit d'un bâtiment, puis d'un manège implanté dans le Domaine de Saint-Cloud. Un employé du site s'était alors porté à sa hauteur afin de l'inviter à redescendre et s'informer de son état de santé, avant de lui demander s'il avait besoin d'aide. Christophe Dominici aurait alors répondu par la négative avant de reprendre son chemin vers l'avenue de la grille d'honneur.
Aucune intervention d'une tierce personne
Les policiers ont également procédé à des vérifications sur les téléphones de Christophe Dominici. Ce dernier n'a adressé aucun message, ni ne s'en est servi avant de quitter son domicile, le jour du drame, en fin de matinée. « Il les a laissés chez lui, poursuit la même source. Nous savons aujourd'hui qu'il n'a appelé personne, ni envoyé de message avant de dire à sa compagne qu'il sortait pour acheter des cigarettes et se balader. »
« L'enquête ouverte par le parquet de Nanterre a pour principal but de déterminer s'il y a eu intervention d'une tierce personne au moment où la victime a basculé dans le vide. Ce n'est pas le cas. Il n'y aura pas, a priori, de demande d'analyse supplémentaire, indique une source judiciaire. Cette enquête pourrait être bouclée d'ici la fin de l'année et la décision du parquet devrait suivre. » Les investigations sur le décès tragique de Christophe Dominici pourraient aboutir, d'ici au début de l'année prochaine, à un classement sans suite pour absence d'infraction par la justice.
Jean Dominici, le père de Christophe décédé le 24 novembre dernier, a préfacé la réédition de la biographie consacrée à son fils - « Bleu à l'âme » -, qui paraît jeudi.
« Bleu à l'âme »
La stupeur était totale quand la terrible nouvelle est tombée dans l'après-midi du mardi 24 novembre, au cours d'une de ces semaines lugubres où le confinement s'accompagnait d'une litanie de décès, avec l'annonce de celui de Diego Maradona le lendemain : Christophe Dominici (48 ans), l'un des rugbymen préférés des Français, star de l'équipe de France célèbre pour son essai de rapine à Twickenham en demi-finales de la Coupe du monde 1999 contre la Nouvelle-Zélande (43-31), était retrouvé sans vie au domaine national de Saint-Cloud, à Boulogne-Billancourt, après avoir chuté d'un parapet en béton de 20 mètres de haut, situé au bord de l'autoroute A13.
Trois mois presque jour pour jour après ce drame, la biographie de « Domi » - « Bleu à l'âme », reparaît jeudi dans une réédition qui accueille une lettre de Jean Dominici à son fils, ainsi que les témoignages de certains de ses meilleurs compagnons de route comme Fabien Galthié, Max Guazzini et Bernard Laporte.
« Mon Cristh,
Quelque chose devenu rare depuis que tu es parti s'est produit aujourd'hui. J'ai été heureux pendant quelques minutes. Un de tes chevaux a gagné, Christophe ! Tu vois, tu l'as bien choisi. Je suis sûr que de là-haut, tu l'as vu franchir la ligne en tête et ça a dû te faire plaisir à toi aussi. C'est bon d'imaginer qu'on puisse encore partager des moments de bonheur tous les deux.
J'ai su que Max (Guazzini) était venu te rendre visite ce matin, au cimetière de la Ritorte, à Hyères où tu reposes avec ta soeur, Pascale. Ta mère y va tous les jours ; moi, tous les deux jours, j'ai du mal. [...]
« On m'a enlevé ta soeur et c'est une partie de moi-même qui est partie avec elle. Maintenant, on m'enlève la moitié qui me faisait vivre et plus rien n'a de sens »
Quand je peux, j'écris. Cela me fait du bien. [...] J'encourage ta mère à en faire autant, mais elle est plus hésitante. Je la vois écrire quelques mots, puis s'interrompre. Elle me lit à voix haute : "Christophe, c'était un homme qui avait besoin d'amour..." Écris-le, Nicole, écris-le... Puis elle enchaîne : "Christophe, tu ne te plaignais jamais, mais tu plaignais les autres, si bien que ta souffrance à toi, au plus profond de mon coeur, je l'ai sentie trop tard, beaucoup trop tard." Je comprends que nous allons avoir du mal à nous défaire de notre culpabilité. [...]
Ne plus te voir. Ne plus t'entendre. C'est dur. On m'a enlevé ta soeur et c'est une partie de moi-même qui est partie avec elle. Maintenant, on m'enlève la moitié qui me faisait vivre et plus rien n'a de sens. [...]
(En apprenant le décès) J'ai aussitôt appelé le premier fiancé de Pascale, qui m'a tout de suite conduit chez toi à Boulogne-Billancourt. Nous sommes arrivés à 2 heures du matin. Loretta était réveillée, mais les petites avaient réussi à s'endormir. Elle m'a dit tout de suite qu'elle ne croyait pas à la thèse du suicide. Qu'elle était follement inquiète pour toi, la maladie t'envahissait, te privant de sommeil, et que quand tu parvenais à dormir un peu, ton repos était perturbé par des cauchemars. Des histoires de poursuites, d'agressions dont tu te sentais victime.
« Pourquoi as-tu basculé du haut d'un édifice du parc de Saint-Cloud depuis lequel tu pouvais voir ta future maison, à Sèvres ? »
Quand je n'écris pas sur toi, je te relis. À la recherche d'un détail qui, au regard de ce qui est arrivé le 24 novembre 2020, à 14 heures, dans le parc de Saint-Cloud - et qui pour l'instant reste un mystère - pourrait apporter un début d'explication. [...] Pourquoi as-tu basculé du haut d'un édifice du parc de Saint-Cloud depuis lequel tu pouvais voir ta future maison, à Sèvres ?
[...]
On t'a retrouvé sur le sol. Mort sur le coup, mais gisant sur le dos. Pas face contre terre comme quelqu'un qui se jette volontairement dans le vide. Ton corps n'était pas disloqué, ton visage pas abîmé. Tes ongles seulement semblaient avoir été arrachés, comme si tu avais tenté de te rattraper. [...] Le décès a été confirmé officiellement à 15 h 05. Les "Petites" étaient à l'école. Et moi, Christophe, je n'étais pas là. J'avais compris que tu n'étais pas bien et je m'étais décidé à te rendre visite durant le week-end précédent ce fatidique mardi 24 novembre. [...] Mais j'ai été victime d'une rage de dents. [...]
Après le décès) Nous avons dû attendre jusqu'au samedi 28 novembre, pour enfin te voir. [...] Et ce que je vais te dire va te paraître bizarre, mais Christophe, tu étais... magnifique dans ton costume noir ! Tu semblais apaisé, comme délivré de tous les démons qui te taraudaient. Et toutes les personnes qui venaient se recueillir auprès de toi, m'ont semblé repartir apaisées, elles aussi. Max est resté trois jours, inconsolable. Il m'a dit : "J'ai perdu l'être que j'aimais le plus au monde." Fabien Galthié, qui n'osait pas entrer au début, est passé et repassé plusieurs fois, refaisant la queue derrière les nouveaux venus. Ça a duré, je ne sais pas : cinq heures ! On aurait juré qu'il avait des choses importantes à te dire.
Ta mère, elle, a passé deux heures à t'embrasser. [...]
« Fabien Galthié, qui n'osait pas entrer au début, est passé et repassé plusieurs fois, refaisant la queue derrière les nouveaux venus. Ça a duré, je ne sais pas : cinq heures ! On aurait juré qu'il avait des choses importantes à te dire »
J'ai reçu un nombre incalculable d'hommages, tellement qu'à la fin, je ne pouvais plus les lire, tant j'étais ému de cette reconnaissance unanime. [...] Comparé au sentiment que tu avais cultivé d'avoir été en quelque sorte "sali" par cette affaire de Béziers, ça me rendait fou. Je confirme que ce qui t'a fait le plus mal, c'est en effet l'échec de la reprise du club de rugby de Béziers, projet dans lequel tu t'es investi corps et âme, 24h/24 en faisant confiance à de mauvaises gens qui t'ont fait rêver et t'ont abandonné. Et je comprends que tu l'aies si mal vécu. Toi le gagneur, tu t'es senti battu, mais pas à la régulière, plutôt sur un coup tordu que tu n'as pas senti venir. Moi non plus d'ailleurs. Le dernier texto que je t'ai envoyé concernait la manière d'appréhender les échecs. J'avais écrit : "Le père de Joe Biden lui a toujours dit (car tu sais qu'il a eu beaucoup de malheurs dans sa vie) :"Champion ! La mesure d'un homme n'est pas la fréquence à laquelle il tombe, mais la vitesse à laquelle il se relève", et moi, je te dis pareil, mon chéri. Je t'aime... Papa."
Ta réponse : "Je t'aime, Papa".
Christophe, tu t'es cru abandonné, mais en fait tout le monde t'aimait et te respectait. [...]
Aujourd'hui, mon Cristh, mon chéri, tu n'es plus là physiquement parmi nous quand tous les objets, les sons, les discussions ne parlent que de toi, mais je me dis que tu es paisible, tu te reposes enfin, tu ne souffres plus. Même si elle est totalement irrationnelle, je m'accroche à cette pensée. Quoi faire d'autre ?
Extraits du témoignage de Fabien Galthié, le sélectionneur du quinze de France, à retrouver dans « Bleu à l'âme ».
« Une phrase de Christophe me revient comme une ritournelle. [...] : "Allez, viens, Nine - ou bien Minot - monte sur mon porte-bagages, je vais te faire gagner !" Dans son regard, du défi : j'ai toujours perçu du défi chez lui à mon égard. Il me challenge. Il exige de moi une réaction. Cette petite phrase avait tendance à me rendre dingue, parce que non, pour rien au monde je n'aurais accepté de monter sur son porte-bagages. Il avait déclenché en moi le moteur du dépassement de soi, de l'orgueil de vouloir être le meilleur de tous, qu'en réalité ce soit lui qui monte sur mon porte-bagages !
Il sentait bien quand je n'arrivais pas à repousser mes limites par moi-même, alors il appuyait là où il toucherait mon orgueil. Cela marchait à tous les coups. Il me chauffait exprès, il me chauffait tout le temps, il ne m'a jamais laissé beaucoup de répit. Il me forçait à aller chercher ce petit supplément d'âme, cette force insoupçonnée que j'avais en moi. Et grâce à cela, je lui dois les dix années de rugby les plus dingues de ma vie !
[...] Parfois, je lisais dans ses yeux du respect pour moi et j'en ressentais une grande fierté, bien qu'il ne l'ait jamais verbalisé... Par pudeur ? Sans doute. Mentalement, je le défiais à mon tour : "Tu as vu ? Pas besoin de monter sur ton porte-bagages !" Il me souriait, l'air de dire : "Attends, c'est pas fini !" Ça a été dix années de yo-yo permanent. Il ne m'a pas lâché pendant dix ans, il n'a jamais rien laissé passer. [...] J'ai eu des "précepteurs" qui m'ont accompagné, mais le mec qui m'a challengé le plus dans ma vie de rugby, c'est sûrement lui.
Il n'y a jamais eu de place pour des "demi-échecs" avec lui. La manière dont il nous a fait vivre la défaite en finale de la Coupe du monde en 1999 face à l'Australie, la manière dont il m'a fait vivre les deux défaites en finale (après prolongations), en Coupe d'Europe et en Top 14 en 2005, la manière dont il m'a fait vivre la défaite en demi-finales contre l'Angleterre en 2003, c'était abominable. [...] Il a synthétisé notre défaite de 2003 face aux Anglais en une erreur stratégique qui aurait pu être évitée alors que j'avais vécu là mon dernier match en équipe de France. Naturellement, je l'ai pris pour une attaque personnelle, car j'étais un des stratèges de l'équipe. Et même si ses critiques paraissaient brutales, voire injustes, finalement, elles étaient fondées. Il faut le reconnaître. Il avait raison.
[...] Je suis aujourd'hui un peu de ce que m'ont donné mes précepteurs, un peu de ce que m'ont donné mes camarades de jeu et un peu de ce que me donnent les joueurs d'aujourd'hui quand je les entraîne. Et Christophe, dans ce mélange, et ça va être dur de lui donner la propriété là-dessus, mais je ne peux pas le nier, il m'a autorisé à penser, à la fin de ma carrière, durant mes années Stade Français notamment, que TOUT ÉTAIT POSSIBLE, que MON équipe pouvait battre tout le monde. Enfin que la haine de la défaite, la douleur de l'échec devaient devenir un moteur. »
Samir Ben Romdhane, l'homme qui a berné Christophe Dominici
Quelques mois avant la mort de l'ancien ailier international, un homme d'affaires franco-tunisien, Samir Ben Romdhane, a fait miroiter monts et merveilles à Christophe Dominici et à son entourage.
À Béziers, le club de rugby qui a remporté onze titres de champion de France est une véritable institution. Mais depuis 2011, il végète en Pro D2. Alors quand Christophe Dominici s'est présenté comme le héraut d'un ambitieux projet au printemps 2020, le tout Béziers a cru au grand retour. Mais la reprise n'a jamais abouti. Un épisode rocambolesque qui a précédé de quelques mois la mort tragique de l'ancien ailier international, le 24 novembre 2020.
La raison de l'échec ? Simple et basique, et finalement courante dans le milieu du sport habitué à croiser quelques personnages fantasques. À Béziers, le potentiel acheteur n'a jamais réussi à prouver sa solvabilité même si, à plusieurs reprises, il a brandi aux yeux des sceptiques des relevés de compte bien garnis, d'au moins plusieurs dizaines de millions d'euros. Cet acheteur s'appelle Samir Ben Romdhane, un Franco-Tunisien âgé de 52 ans. Il se présentait comme un businessman aux activités multiples, ayant fait fortune dans l'immobilier et le pétrole. Où ? Un peu partout, en Allemagne, où il a vécu et aurait conservé quelques inimitiés. Au Moyen-Orient également. Il indiquait notamment qu'il entretenait des liens très forts avec de richissimes Émiriens.
Mais le conditionnel est de mise car, à aucun moment durant notre enquête, nous n'avons eu confirmation de sa fortune. Depuis l'automne 2020, il vivrait aux Émirats arabes unis, sans sa famille restée à Paris. Il y a une quinzaine de jours, il serait revenu en France mais pour un court séjour. Insaisissable et injoignable, aussi. Thierry Braillard, l'ancien secrétaire d'État aux Sports, qui est son avocat et est intervenu dans la tentative de reprise du club, a refusé de nous répondre et de nous mettre en relation avec son client. On n'a pas eu plus de chance avec Philippe Baillard, le bras droit de Ben Romdhane, directeur financier ou administratif des sociétés Sotaco, qui devait devenir coprésident de l'AS Béziers. « Je n'ai pas envie qu'il parle, car il va aller dans la gueule du loup, il va se faire piéger. Je ne peux pas cautionner ça. »
« Il est sympathique, peut-être un peu trop sympathique, c'est un beau parleur, un homme habile »
Robert Ménard, maire de Béziers
Alors qui est Samir Ben Romdhane ? Un homme peu fiable ? Un affabulateur ? L'entourage de Christophe Dominici emploie d'autres mots et songe agir en justice pour en savoir plus sur ce personnage. Loretta Denaro, la veuve de Christophe Dominici, n'a pas souhaité faire de commentaire.
Une chose est certaine, à Béziers, beaucoup ont cru en Samir Ben Romdhane, à commencer par Robert Ménard, le maire : « Il est sympathique, peut-être un peu trop sympathique, c'est un beau parleur, un homme habile. » Habile et élégant. Le costume trois-pièces taillé sur mesure est toujours impeccable. « Quand je suis allé à Paris pour le rencontrer, c'était chez lui, une adresse chic, un appartement chic. Tout est alors plausible, crédible. De plus, son avocat est connu, un ancien secrétaire d'Etat. Et Me Braillard m'a conforté à plusieurs reprises sur la solidité du projet des repreneurs. »
Samir Ben Romdhane (au centre) entouré de son avocat Me Thierry Braillard (à droite), ancien secrétaire d'Etat aux Sports, et du golfeur professionnel Stéphane Chauffour. (DR)
L'appartement dont parle Ménard, qui a vu défiler beaucoup de monde dont Me Braillard ou Bernard Laporte, se situe dans le VIIIe arrondissement. Un logement qui a joué un rôle capital dans cette histoire. « À l'automne 2019, se souvient Yannick Pons, associé de Christophe Dominici dans plusieurs sociétés, notamment viticoles, je demande à un ami, Alain Proux, si je peux aller passer quelques jours à Paris, dans son appartement. Je me retrouve dans cet appartement. À un moment, Alain Proux, qui voulait le vendre, me demande d'assurer une visite avec de potentiels acheteurs. J'accepte, j'achète une bouteille, je prépare le rendez-vous. Arrivent alors Samir Ben Romdhane et son épouse. La visite se passe bien. Ils s'engagent à l'acheter... »
Au cours de l'échange, Yannick Pons se dévoile, raconte qu'il fait du vin. Les Ben Romdhane lui rétorquent qu'ils ont toujours rêvé d'investir dans ce domaine. « Quelques mois plus tard, en mars 2020, se souvient Pons, Samir me demande s'il peut venir à Béziers afin de visiter les terres. Il est intéressé, il veut acheter. Il vient chez moi, tout se passe bien. On va au restaurant, au Lavoir, où on a d'ailleurs passé beaucoup de temps avec Christophe. On parle de Béziers et aussi du club de rugby qui n'est pas au mieux. Il est accompagné de son homme de confiance, Philippe Baillard. Ben Romdhane lâche alors qu'il peut aider le club. Il me demande d'appeler le maire pour voir ce qu'il est possible de faire. Robert Ménard nous donne un rendez-vous, le lendemain, à 8 heures, à la mairie. »
Une réunion se tient, puis une deuxième, puis une troisième. Les propriétaires du club, Cédric Bistué et Pierre-Olivier Valaize, y participent... « Mais moi, je n'y connais rien au rugby », reconnaît Pons qui nous a d'ailleurs confié durant l'entretien qu'il avait longtemps pensé pouvoir faire des affaires avec Ben Romdhane, notamment en vendant du vin et de l'eau au Moyen-Orient. « Alors rapidement, poursuit-il, je dis à tout le monde qu'il faut faireappel à Christophe Dominici. Je l'appelle, je lui présente la chose. Il me répond dans la foulée qu'il arrive. »
«À chaque fois que « Domi » appelait Ben Romdhane pour lui demander si telle signature était possible, il réfléchissait deux secondes avant de dire oui. Les salaires étaient incroyables »
Benjamin Bagate, qui devait devenir directeur sportif
La machine démarre, elle s'emballe vite. Dominici rencontre Ben Romdhane. Les soirées s'éternisent. Un véritable coup de foudre. « Ils s'appelaient "mon frère" », raconte Jean-Marie Dominici, le père de Christophe. Dominici travaille, ne dort plus, ou peu. Il recharge son téléphone trois fois par jour. Il croit au projet. Un sentiment de revanche l'habite. Il n'a pas digéré la fin de son histoire avec le Stade Français (Démis de ses fonctions d'entraîneur adjoint en septembre 2009.). Les agents débarquent. Le recrutement prend forme, le staff technique aussi.
Benjamin Bagate, qui devait devenir directeur sportif, n'a rien oublié. « À chaque fois que Domi appelait Ben Romdhane, pour lui demander si telle signature était possible, il réfléchissait deux secondes avant de dire oui. Les salaires étaient incroyables. » Les noms de Jordan Taufua, numéro 8 du LOU, et de Ma'a Nonu, le centre all black double champion du monde, apparaissent dans le tableau prévisionnel. Un contrat de trois ans les attend, avec 45 000 euros la première saison, 55 000 la deuxième et plus de 70 000 euros la dernière. Le budget pour la saison 2020-2021 approche les 16 M€.
Samir Ben Romdhane (à gauche avec son fidèle collaborateur, Philippe Baillard, à droite) et Stéphane Chauffour, jour de golf professionnel (au centre) (DR)
En parallèle, les négociations avec les propriétaires avancent. Trois documents officiels sont signés : un accord de confidentialité, une lettre d'intention, puis un protocole d'accord de 15 pages. Ben Romdhane, Me Braillard, son avocat, et Philippe Baillard, le directeur financier, dévoilent la répartition du capital. Elle est expliquée dans une note dont le contenu a été porté à notre connaissance et qui dévoile un montage complexe de sociétés, toutes baptisées Sotaco quelque chose et basées aux Émirats arabes unis, mais aussi en France, rue des Rigoles, dans le XXe... «Des coquilles vides », selon un connaisseur du dossier.
Apparaît aussi le nom de Mohammed Hratz Bakhit Suhail Al Rashdi, présenté par Samir Ben Romdhane comme un prince et son partenaire financier. Nous avons sollicité en vain le prince qui pourrait en définitive ne pas en être un. Sur le site Internet de sa société, United Global Holding, il se fait appeler Docteur Al Rashdi et ne revendique jamais son appartenance à une quelconque noblesse. Mais, pour acheter un club, il ne suffit pas de signer des bouts de papier, il faut mettre de l'argent et passer l'obstacle de la DNACG qui depuis la loi Braillard de 2017 contrôle et évalue les projets d'achat. Le 2 juillet 2020, sur RMC, Dominique Debreyer, le président de la DNACG lâche : « Je n'ai pas vu l'ombre pour l'instant d'un bout de dossier. »
Une déclaration qui interpelle le maire de Béziers. Le 4 juillet, le patron de l'organe financier, reprend la parole. Il a reçu des documents mais ajoute que le dossier est incomplet. Las, épuisé, Christophe Dominici propose alors de signer un chèque de 300 000 euros pour accélérer le procédé et arranger Ben Romdhane qui peine à débloquer les fonds. Me Braillard a une autre idée. Il propose à l'ancien joueur d'effectuer un prêt. Dans un mail, il écrit : « En cas de non-remboursement, le groupe Montebacco pourrait devenir propriétaire des actions achetées. » Montebacco, c'est le nom d'une des entreprises de Christophe Dominici.
Le 8 juillet, les repreneurs produisent une lettre de confort de la banque de Chine, selon laquelle la société a une réserve de 20 millions de dollars. Rapidement, quelques protagonistes émettent des doutes sur la véracité du document. Pourtant, le 13 juillet, la DNACG étudie le dossier. La réunion se passe en visioconférence à deux jours de la fin du marché des transferts. Il est impossible de conclure la vente aussi vite. De bonne composition, les vendeurs acceptent de prendre en charge le recrutement initié par Dominici, mais à condition que Sotaco offre une garantie.
Ben Romdhane présente un chèque de 6 millions d'euros de la CommerzBank. Les membres de la DNACG sont sceptiques, les vendeurs aussi. Philippe Baillard s'emporte. Un témoin raconte : « Il a alors dit qu'il valait mieux arrêter là si les vendeurs n'avaient pas confiance dans un chèque. » Samir Ben Romdhane n'a donc jamais racheté Béziers. Ses proches assurent qu'il n'est pas responsable puisque son associé émirien se serait retiré.
Malgré cet échec, l'ancien joueur et Ben Romdhane ont continué de se fréquenter. Cela peut surprendre mais, pour atténuer la déception de Dominici, l'homme d'affaires lui promet un pourcentage sur la vente de barils de pétrole. Le contrat est incroyable. Dominici le signe.
Il propose au père de Christophe Dominici de fêter ses 80 ans sur un yacht
En août 2020, Ben Romdhane, avec sa famille, passe même une dizaine de jours à Sollies-Pont, dans le Var, chez les parents de l'ancien joueur de Toulon. « Ils sont arrivés en voiture, raconte Jean-Marie, son père. Une voiture modeste. J'ai trouvé ça bizarre pour un milliardaire. » « Moi, je suis allé avec monsieur Ben Romdhane et son épouse visiter dans la région de Cannes une villa à 11 millions d'euros, se souvient Nicole, la maman de Dominici. Sa femme était emballée, elle voulait seulement changer la cuisine. »
Jean-Marie Dominici, père de Christophe. (E. Garnier/L'Équipe)
Durant notre enquête, on a effectivement découvert que Samir Ben Romdhane avait promis l'acquisition de nombreux biens immobiliers. Il y a le fameux appartement meublé de 230 m2 du VIIIe arrondissement, dans lequel vit sa famille depuis deux ans. « Ils squattent, tout simplement, et j'ai lancé une procédure d'expulsion et fait venir un huissier », jure Alain Proux, le propriétaire. Et puis, un jour, un agent immobilier du village varois où sont installés les parents Dominici passe à l'improviste pour proposer la maison du voisin, qui est à vendre.
Ben Romdhane écoute, s'emballe et dit qu'il est intéressé. Pour des raisons obscures, il est dans l'incapacité de signer le compromis. Il demande au père de Dominici de le faire, d'aller chez le notaire, en attendant de pouvoir débloquer les fonds. Le 24 septembre, dans un mail, Ben Romdhane écrit à Jean-Marie Dominici : « J'ai bien reçu ton mail, je vais signer l'offre, et je t'envoie ça lundi matin... Je vous embrasse très fort. »
Malgré plusieurs relances, l'argent n'arrivera jamais. Le 26 décembre 2020, un mois après la mort de Christophe Dominici, Philippe Baillard envoie un mail aux parents du défunt, et confirme que l'achat ne se fera pas, parce que leur fils est mort, et parce que Ben Romdhane est bloqué à Abu Dhabi... « Avec un délai de quelques jours, écrit-il, je peux par mes activités annexes vous permettre d'obtenir rapidement les refus bancaires nécessaires à vous dégager de la promesse de vente. »
Le club, les immeubles, les villas, le pétrole... Il y a aussi l'achat d'un avion, un Falcon 2 000 qui appartient à feu Olivier Dassault. Un protocole d'accord est signé pour 7,8 millions d'euros. Et puis il y a ce yacht, l'Irimari. Il discute avec le capitaine, et s'engage à l'acheter. Le prix ? 50 millions d'euros. « Il m'a beaucoup parlé de ce bateau, mais on ne l'a jamais vu alors qu'il était apparemment au large de la Ciotat, se remémore Jean-Marie Dominici. Il a même proposé, lorsqu'il était chez nous, d'organiser mes 80 ans à bord. » Du vent...
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Samir Ben Romdhane, l'homme qui a berné Christophe Dominici Quelques mois avant la mort de l'ancien ailier international, un homme d'affaires franco-tunisien, Samir Ben Romdhane, a fait miroiter monts et merveilles à Christophe Dominici et à son entourage.
À Béziers, le club de rugby qui a remporté onze titres de champion de France est une véritable institution. Mais depuis 2011, il végète en Pro D2. Alors quand Christophe Dominici s'est présenté comme le héraut d'un ambitieux projet au printemps 2020, le tout Béziers a cru au grand retour. Mais la reprise n'a jamais abouti. Un épisode rocambolesque qui a précédé de quelques mois la mort tragique de l'ancien ailier international, le 24 novembre 2020.
La raison de l'échec ? Simple et basique, et finalement courante dans le milieu du sport habitué à croiser quelques personnages fantasques. À Béziers, le potentiel acheteur n'a jamais réussi à prouver sa solvabilité même si, à plusieurs reprises, il a brandi aux yeux des sceptiques des relevés de compte bien garnis, d'au moins plusieurs dizaines de millions d'euros. Cet acheteur s'appelle Samir Ben Romdhane, un Franco-Tunisien âgé de 52 ans. Il se présentait comme un businessman aux activités multiples, ayant fait fortune dans l'immobilier et le pétrole. Où ? Un peu partout, en Allemagne, où il a vécu et aurait conservé quelques inimitiés. Au Moyen-Orient également. Il indiquait notamment qu'il entretenait des liens très forts avec de richissimes Émiriens.
Mais le conditionnel est de mise car, à aucun moment durant notre enquête, nous n'avons eu confirmation de sa fortune. Depuis l'automne 2020, il vivrait aux Émirats arabes unis, sans sa famille restée à Paris. Il y a une quinzaine de jours, il serait revenu en France mais pour un court séjour. Insaisissable et injoignable, aussi. Thierry Braillard, l'ancien secrétaire d'État aux Sports, qui est son avocat et est intervenu dans la tentative de reprise du club, a refusé de nous répondre et de nous mettre en relation avec son client. On n'a pas eu plus de chance avec Philippe Baillard, le bras droit de Ben Romdhane, directeur financier ou administratif des sociétés Sotaco, qui devait devenir coprésident de l'AS Béziers. « Je n'ai pas envie qu'il parle, car il va aller dans la gueule du loup, il va se faire piéger. Je ne peux pas cautionner ça. »
« Il est sympathique, peut-être un peu trop sympathique, c'est un beau parleur, un homme habile »
Robert Ménard, maire de Béziers
Alors qui est Samir Ben Romdhane ? Un homme peu fiable ? Un affabulateur ? L'entourage de Christophe Dominici emploie d'autres mots et songe agir en justice pour en savoir plus sur ce personnage. Loretta Denaro, la veuve de Christophe Dominici, n'a pas souhaité faire de commentaire.
Une chose est certaine, à Béziers, beaucoup ont cru en Samir Ben Romdhane, à commencer par Robert Ménard, le maire : « Il est sympathique, peut-être un peu trop sympathique, c'est un beau parleur, un homme habile. » Habile et élégant. Le costume trois-pièces taillé sur mesure est toujours impeccable. « Quand je suis allé à Paris pour le rencontrer, c'était chez lui, une adresse chic, un appartement chic. Tout est alors plausible, crédible. De plus, son avocat est connu, un ancien secrétaire d'Etat. Et Me Braillard m'a conforté à plusieurs reprises sur la solidité du projet des repreneurs. »
Samir Ben Romdhane (au centre) entouré de son avocat Me Thierry Braillard (à droite), ancien secrétaire d'Etat aux Sports, et du golfeur professionnel Stéphane Chauffour. (DR)
L'appartement dont parle Ménard, qui a vu défiler beaucoup de monde dont Me Braillard ou Bernard Laporte, se situe dans le VIIIe arrondissement. Un logement qui a joué un rôle capital dans cette histoire. « À l'automne 2019, se souvient Yannick Pons, associé de Christophe Dominici dans plusieurs sociétés, notamment viticoles, je demande à un ami, Alain Proux, si je peux aller passer quelques jours à Paris, dans son appartement. Je me retrouve dans cet appartement. À un moment, Alain Proux, qui voulait le vendre, me demande d'assurer une visite avec de potentiels acheteurs. J'accepte, j'achète une bouteille, je prépare le rendez-vous. Arrivent alors Samir Ben Romdhane et son épouse. La visite se passe bien. Ils s'engagent à l'acheter... »
Au cours de l'échange, Yannick Pons se dévoile, raconte qu'il fait du vin. Les Ben Romdhane lui rétorquent qu'ils ont toujours rêvé d'investir dans ce domaine. « Quelques mois plus tard, en mars 2020, se souvient Pons, Samir me demande s'il peut venir à Béziers afin de visiter les terres. Il est intéressé, il veut acheter. Il vient chez moi, tout se passe bien. On va au restaurant, au Lavoir, où on a d'ailleurs passé beaucoup de temps avec Christophe. On parle de Béziers et aussi du club de rugby qui n'est pas au mieux. Il est accompagné de son homme de confiance, Philippe Baillard. Ben Romdhane lâche alors qu'il peut aider le club. Il me demande d'appeler le maire pour voir ce qu'il est possible de faire. Robert Ménard nous donne un rendez-vous, le lendemain, à 8 heures, à la mairie. »
Une réunion se tient, puis une deuxième, puis une troisième. Les propriétaires du club, Cédric Bistué et Pierre-Olivier Valaize, y participent... « Mais moi, je n'y connais rien au rugby », reconnaît Pons qui nous a d'ailleurs confié durant l'entretien qu'il avait longtemps pensé pouvoir faire des affaires avec Ben Romdhane, notamment en vendant du vin et de l'eau au Moyen-Orient. « Alors rapidement, poursuit-il, je dis à tout le monde qu'il faut faireappel à Christophe Dominici. Je l'appelle, je lui présente la chose. Il me répond dans la foulée qu'il arrive. »
«À chaque fois que « Domi » appelait Ben Romdhane pour lui demander si telle signature était possible, il réfléchissait deux secondes avant de dire oui. Les salaires étaient incroyables »
Benjamin Bagate, qui devait devenir directeur sportif
La machine démarre, elle s'emballe vite. Dominici rencontre Ben Romdhane. Les soirées s'éternisent. Un véritable coup de foudre. « Ils s'appelaient "mon frère" », raconte Jean-Marie Dominici, le père de Christophe. Dominici travaille, ne dort plus, ou peu. Il recharge son téléphone trois fois par jour. Il croit au projet. Un sentiment de revanche l'habite. Il n'a pas digéré la fin de son histoire avec le Stade Français (Démis de ses fonctions d'entraîneur adjoint en septembre 2009.). Les agents débarquent. Le recrutement prend forme, le staff technique aussi.
Benjamin Bagate, qui devait devenir directeur sportif, n'a rien oublié. « À chaque fois que Domi appelait Ben Romdhane, pour lui demander si telle signature était possible, il réfléchissait deux secondes avant de dire oui. Les salaires étaient incroyables. » Les noms de Jordan Taufua, numéro 8 du LOU, et de Ma'a Nonu, le centre all black double champion du monde, apparaissent dans le tableau prévisionnel. Un contrat de trois ans les attend, avec 45 000 euros la première saison, 55 000 la deuxième et plus de 70 000 euros la dernière. Le budget pour la saison 2020-2021 approche les 16 M€.
Samir Ben Romdhane (à gauche avec son fidèle collaborateur, Philippe Baillard, à droite) et Stéphane Chauffour, jour de golf professionnel (au centre) (DR)
En parallèle, les négociations avec les propriétaires avancent. Trois documents officiels sont signés : un accord de confidentialité, une lettre d'intention, puis un protocole d'accord de 15 pages. Ben Romdhane, Me Braillard, son avocat, et Philippe Baillard, le directeur financier, dévoilent la répartition du capital. Elle est expliquée dans une note dont le contenu a été porté à notre connaissance et qui dévoile un montage complexe de sociétés, toutes baptisées Sotaco quelque chose et basées aux Émirats arabes unis, mais aussi en France, rue des Rigoles, dans le XXe... «Des coquilles vides », selon un connaisseur du dossier.
Apparaît aussi le nom de Mohammed Hratz Bakhit Suhail Al Rashdi, présenté par Samir Ben Romdhane comme un prince et son partenaire financier. Nous avons sollicité en vain le prince qui pourrait en définitive ne pas en être un. Sur le site Internet de sa société, United Global Holding, il se fait appeler Docteur Al Rashdi et ne revendique jamais son appartenance à une quelconque noblesse. Mais, pour acheter un club, il ne suffit pas de signer des bouts de papier, il faut mettre de l'argent et passer l'obstacle de la DNACG qui depuis la loi Braillard de 2017 contrôle et évalue les projets d'achat. Le 2 juillet 2020, sur RMC, Dominique Debreyer, le président de la DNACG lâche : « Je n'ai pas vu l'ombre pour l'instant d'un bout de dossier. »
Une déclaration qui interpelle le maire de Béziers. Le 4 juillet, le patron de l'organe financier, reprend la parole. Il a reçu des documents mais ajoute que le dossier est incomplet. Las, épuisé, Christophe Dominici propose alors de signer un chèque de 300 000 euros pour accélérer le procédé et arranger Ben Romdhane qui peine à débloquer les fonds. Me Braillard a une autre idée. Il propose à l'ancien joueur d'effectuer un prêt. Dans un mail, il écrit : « En cas de non-remboursement, le groupe Montebacco pourrait devenir propriétaire des actions achetées. » Montebacco, c'est le nom d'une des entreprises de Christophe Dominici.
Le 8 juillet, les repreneurs produisent une lettre de confort de la banque de Chine, selon laquelle la société a une réserve de 20 millions de dollars. Rapidement, quelques protagonistes émettent des doutes sur la véracité du document. Pourtant, le 13 juillet, la DNACG étudie le dossier. La réunion se passe en visioconférence à deux jours de la fin du marché des transferts. Il est impossible de conclure la vente aussi vite. De bonne composition, les vendeurs acceptent de prendre en charge le recrutement initié par Dominici, mais à condition que Sotaco offre une garantie.
Ben Romdhane présente un chèque de 6 millions d'euros de la CommerzBank. Les membres de la DNACG sont sceptiques, les vendeurs aussi. Philippe Baillard s'emporte. Un témoin raconte : « Il a alors dit qu'il valait mieux arrêter là si les vendeurs n'avaient pas confiance dans un chèque. » Samir Ben Romdhane n'a donc jamais racheté Béziers. Ses proches assurent qu'il n'est pas responsable puisque son associé émirien se serait retiré.
Malgré cet échec, l'ancien joueur et Ben Romdhane ont continué de se fréquenter. Cela peut surprendre mais, pour atténuer la déception de Dominici, l'homme d'affaires lui promet un pourcentage sur la vente de barils de pétrole. Le contrat est incroyable. Dominici le signe.
Il propose au père de Christophe Dominici de fêter ses 80 ans sur un yacht
En août 2020, Ben Romdhane, avec sa famille, passe même une dizaine de jours à Sollies-Pont, dans le Var, chez les parents de l'ancien joueur de Toulon. « Ils sont arrivés en voiture, raconte Jean-Marie, son père. Une voiture modeste. J'ai trouvé ça bizarre pour un milliardaire. » « Moi, je suis allé avec monsieur Ben Romdhane et son épouse visiter dans la région de Cannes une villa à 11 millions d'euros, se souvient Nicole, la maman de Dominici. Sa femme était emballée, elle voulait seulement changer la cuisine. »
Jean-Marie Dominici, père de Christophe. (E. Garnier/L'Équipe)
Durant notre enquête, on a effectivement découvert que Samir Ben Romdhane avait promis l'acquisition de nombreux biens immobiliers. Il y a le fameux appartement meublé de 230 m2 du VIIIe arrondissement, dans lequel vit sa famille depuis deux ans. « Ils squattent, tout simplement, et j'ai lancé une procédure d'expulsion et fait venir un huissier », jure Alain Proux, le propriétaire. Et puis, un jour, un agent immobilier du village varois où sont installés les parents Dominici passe à l'improviste pour proposer la maison du voisin, qui est à vendre.
Ben Romdhane écoute, s'emballe et dit qu'il est intéressé. Pour des raisons obscures, il est dans l'incapacité de signer le compromis. Il demande au père de Dominici de le faire, d'aller chez le notaire, en attendant de pouvoir débloquer les fonds. Le 24 septembre, dans un mail, Ben Romdhane écrit à Jean-Marie Dominici : « J'ai bien reçu ton mail, je vais signer l'offre, et je t'envoie ça lundi matin... Je vous embrasse très fort. »
Malgré plusieurs relances, l'argent n'arrivera jamais. Le 26 décembre 2020, un mois après la mort de Christophe Dominici, Philippe Baillard envoie un mail aux parents du défunt, et confirme que l'achat ne se fera pas, parce que leur fils est mort, et parce que Ben Romdhane est bloqué à Abu Dhabi... « Avec un délai de quelques jours, écrit-il, je peux par mes activités annexes vous permettre d'obtenir rapidement les refus bancaires nécessaires à vous dégager de la promesse de vente. »
Le club, les immeubles, les villas, le pétrole... Il y a aussi l'achat d'un avion, un Falcon 2 000 qui appartient à feu Olivier Dassault. Un protocole d'accord est signé pour 7,8 millions d'euros. Et puis il y a ce yacht, l'Irimari. Il discute avec le capitaine, et s'engage à l'acheter. Le prix ? 50 millions d'euros. « Il m'a beaucoup parlé de ce bateau, mais on ne l'a jamais vu alors qu'il était apparemment au large de la Ciotat, se remémore Jean-Marie Dominici. Il a même proposé, lorsqu'il était chez nous, d'organiser mes 80 ans à bord. » Du vent...
Je crois que c’est tout simplement un mythomane, ce sont des gens incroyables et dérangeants.