«Le rugby est un jeu chaotique, non structuré. Vous devez être en mesure de réagir, de prendre des décisions et de déterminer où vous vous êtes trompé. »
Lorsqu’un technicien comme Eddie Jones parle de rugby, il n’évoque pas particulièrement les phases arrêtées de conquête. Il préfère retenir le côté imprévisible de ce sport où l’intelligence situationnelle d’un joueur peut débloquer l’issue d’un match.
N’importe quel technicien apprécierait forcément un essai marqué en première main. Le signe que le travail à l’entraînement paie. Mais le rugby ne peut pas se résumer à cela. Les matchs sont constitués avant tout de phases de jeu que l’on ne peut prévoir. Et cela devient même une philosophie dans certains squads.
« On est dans notre élément quand il y a du désordre sur le terrain plutôt que de partir sur des schémas à 15 temps de jeu programmés », détaillait d’ailleurs Laurent Labit, entraîneur adjoint en charge des trois-quarts du XV de France, lors du dernier Tournoi des Six Nations.
« Retrouver des situations de contre et d’attaque de ligne »
Ces fameuses phases de désordre, où il faut faire le bon geste au bon moment, constituent l’ADN même du rugby à 7. Ce jeu, en perpétuel mouvement et sans temps morts, implique une certaine polyvalence de manière à répéter les tâches. Mais c’est surtout dans l’adaptation tactique aux différentes situations que le 7 peut apporter de réelles aptitudes à tout joueur de rugby.
« Par sa pratique, le sept vous oblige à être très polyvalent. Et de manière plus globale, s’entraîner à effectif réduit va permettre de retrouver des situations de contre et d’attaque de ligne. Cela permet d’être constamment concerné par le jeu », explique Germain Igarza, entraîneur assistant de l’équipe de France féminine à 7.
« Le sept peut être un outil de développement pour les joueurs et les joueuses, abonde Paul Albaledejo, entraîneur de l’ASM Sevens. C’est un formidable outil de perfectionnement dans la gestion des espaces libres et du jeu sans ballon. C’est de l’intelligence situationnelle. Le sept permet également de développer des qualités tactiques mais aussi mentales. »
Si les bases restent les mêmes, le fait de répéter des oppositions à hautes intensités avec de longues séquences de course amène les joueurs à se dépasser. Mentalement ce n’est pas simple, mais les joueurs se doivent de tenir le rythme. Et cela a bien sûr des répercussions sur leur comportement sur le terrain.
Si aujourd’hui quelques techniciens veulent créer des passerelles entre le 7 et le 15, peut-on envisager des sessions spécifiques dans un club de Top 14 ? « On pourrait très bien imaginer des cycles, explique Jean-Pascal Barraque, international à sept. Dans la préparation d’avant-saison, cela permettrait de travailler le cardio par exemple. Les joueurs peuvent ainsi progresser physiquement tout en touchant beaucoup le ballon. »
Une notion de plaisir qui n’est pas non plus négligeable dans la construction de tout rugbyman.
Arnaud Clergue (La Montagne - 13/11/2021)