Après cinq mois de compétition et une quinzaine de matchs, il est déjà temps de dresser un premier état des lieux du comportement des recrues de l’été dernier. Au-delà du talent des joueurs en tant que tel, il est ici question d’intégration, de pertinence des choix, d’optimisation ou non des potentiels, de rapport entre les attentes et le rendu.
1. Owen Farrell
Ouvreur ou centre - Racing 92
33 ans - 112 sélections (Angleterre)
Club précédent : Saracens
8 matchs de Top 14 cette saison - 20 points
Que représente Owen Farrell ? Un monde à lui seul : 112 sélections et 1237 points marqués avec l’Angleterre, six titres en Premiership et trois en Champions Cup. Dès lors, à l’instant où l’ancien meneur de jeu des Saracens posa le pied en Top 14, on se convainquit que le Racing aurait cette année la gueule d’un champion de France. Et puis ? La déception étant toujours proportionnelle à l’admiration que l’on éprouve, les performances plus que neutres de Farrell nous ont rapidement plongés dans un abîme de désarroi. Le Londonien est certes agressif au plaquage mais trop lent dans l’animation offensive et, malgré son pedigree, a préféré laisser le tir au but à Nolann Le Garrec. Dans les Hauts-de-Seine, on dit pourtant que Farrell, récemment opéré d’une pubalgie, ne devait sa méforme qu’à cette blessure et qu’il montrera un tout autre visage dès son retour, le 18 janvier face aux Stormers.
2. Raffaele Costa Storti
Ailier - Stade français
24 ans - 26 sélections (Portugal)
Club précédent : Béziers
2 matchs de Top 14 cette saison - 5 points
La saison dernière et alors qu’il évoluait à Béziers, Raffaele Costa Storti affolait les compteurs du Pro D2, aplatissant même la bagatelle de vingt essais en vingt-et-une rencontres. Au moment où l’international portugais (24 ans, 26 sélections) démarra sa première saison en Top 14, on attendit donc de lui monts et merveilles. Six mois plus tard, Raffaele Costa Storti, dont le rendement est jugé insuffisant par son staff technique à Paris, n’a pourtant connu que deux titularisations en treize journées avec le Stade français. Pourquoi un tel flop, au juste ? Et son style de jeu est-il vraiment trop risqué, comme le disent certains membres du club de la capitale ? On n’en sait rien. Toujours est-il que récemment, l’international portugais a été reçu par le Castres olympique, le club tarnais étant visiblement enclin à se renforcer sur les extérieurs en vue de la saison prochaine.
3. Antoine Frisch
Centre - Toulon
28 ans - 2 sélections (France)
Club précédent : Munster
7 matchs de Top 14 cette saison - 0 point
De Tarbes à Toulon via Rouen, Bristol et le Munster, l’histoire d’Antoine Frisch est belle. Toujours est-il que le centre de 28 ans, débarqué à Mayol avec le statut de néointernational et de valeur montante du poste cet été, n’a pas encore tenu les promesses nées de son recrutement. Clairement, le natif de Fontainebleau ne pèse pas assez sur le jeu varois et il est trop timoré balle en main pour effectuer de véritables différences sur le plan individuel. Ses statistiques s’en ressentent : zéro essai, deux franchissements, quatre défenseurs battus, seulement, en sept matchs de Top 14. Joueur de système, régulateur plus que perforateur, à l’image de son apport défensif (à plus de 90 % aux plaquages), cet ouvreur de formation peut-il hausser le curseur avec plus de vécu collectif ? Les supporters varois l’espèrent fortement.
4. Harry Williams
Pilier droit - Pau
33 ans - 19 sélections (Angleterre)
Club précédent : Montpellier
7 matchs de Top 14 cette saison - 0 point
Harry Williams avait connu une première année en France difficile du côté de Montpellier et il est arrivé à la Section paloise avec l’envie de démontrer que ce n’était qu’une somme d’incompréhensions. Il a d’ailleurs fait preuve d’un réel enthousiasme lors de ses premiers entraînements dans le Béarn, alors que la Section paloise voulait se renforcer au niveau de sa première ligne. L’international anglais a tout de suite été aligné par le staff technique avec un temps de jeu intéressant, en raison notamment de la blessure au tendon d’Achille de Siate Tokolahi, numéro un au poste au club ces dernières saisons. Néanmoins, la mêlée béarnaise n’est toujours pas dominante, même si elle n’est pas en grande difficulté. Pour l’instant, Harry Williams n’a toujours retrouvé son niveau de jeu d’Exeter, ce qui est plus que frustrant.
5. Thomas Vincent
Ouvreur - Montpellier
25 ans
Club précédent : Agen
9 matchs de Top 14 cette saison - 35 points
Solidement installé à Agen où il dirigeait le jeu du SUA depuis trois saisons après s’être révélé à Aurillac, l’ouvreur de 25 ans relevait un sacré défi en s’engageant avec le MHR pour découvrir le Top 14. Initialement, l’ex-Agenais aurait dû avoir plus de temps pour s’y adapter en prenant la roue de l’ex-Oyonnaxien Domingo Miotti, recruté pour compenser le départ de Louis Carbonel vers Paris. Seulement, Miotti est absent en raison d’une blessure au genou et Vincent a été propulsé numéro un. Un peu tôt pour un joueur qui possède d’indéniables qualités physiques ou au pied, mais qui commet encore trop d’erreurs qui coûtent trop cher. L’exemple le plus probant est certainement son match à Toulon où, placé à l’arrière, Vincent a manqué de précision face aux perches et a offert un essai à Baptiste Serin en jouant rapidement une touche.
6. Romain Taofifenua
Deuxième ligne - Racing 92
34 ans - 53 sélections (France)
Club précédent : Lyon
8 matchs de Top 14 cette saison - 5 points
Originellement, les Racingmen avaient recruté le « grand Tao » pour densifier un paquet d’avants dont on doutait naguère de la solidité. Six mois plus tard, le verdict est plutôt mitigé. Depuis le début de saison, Romain Taofifenua (34 ans, 53 sélections) ne compte que sept titularisations avec son nouveau club, toutes compétitions confondues. Surtout, aucun des envoyés spéciaux du Midol détaché sur les matchs du Racing 92 n’a jusqu’ici accordé la moindre étoile au géant du XV de France ! Si le deuxième ligne international reste évidemment une force de frappe dans les mauls pénétrants et en mêlée fermée, il s’est surtout jusqu’ici montré très indiscipliné, écopant d’ailleurs de deux cartons jaunes lors des quelques matchs qu’il eut à disputer avec le Racing. Le « grand Tao » tournera-t-il bientôt à pleine puissance ?
7. Joe Jonas
Arrière ou ailier - Stade français
23 ans
Club précédent : Biarritz
10 matchs de Top 14 cette saison - 10 points
C’est peu dire que Joe Jonas a débarqué dans la capitale lesté d’une solide réputation. Sous le maillot du Biarritz olympique, le Sud-Africain de naissance avait en effet brillé de mille feux sur la Côte basque pendant quatre saisons et, de lui, on aimait alors les appuis dingues, les courses chaloupées, ce goût immodéré pour l’attaque et aussi la capacité à frapper aux buts, lorsque les circonstances l’exigeaient. Pour autant, le spectaculaire Joe Jonas n’a pas encore confirmé les espoirs placés en lui et, sous le maillot parisien, il enchaîne les performances plutôt neutres. Sans être totalement mauvais, Joe Jonas laisse pour le moment assez indifférent. Et, à tout dire, ça ne lui ressemble pas. Mais alors, pas du tout…
8. Michael Alaalatoa
Pilier droit - Clermont
33 ans - 20 sélections (Samoa)
Club précédent : Leinster
4 matchs de Top 14 cette saison - 0 point
Sur le papier, la prise avait belle allure : dans un chassé-croisé au poste de pilier droit avec Rabah Slimani, Michael Alaalatoa rejoignait Clermont à l’intersaison. Et sur le CV, quelques lignes prestigieuses : cinq fois vainqueur du Super Rugby avec les Crusaders (2017, 2018, 2019, 2020, 2021), trois fois finaliste de la Champions Cup avec le Leinster (2022, 2023, 2024) avec qui il tenait le rôle de doublure de luxe de Furlong, et co-capitaine des Samoa à la Coupe du monde 2023. Et puis ? Pas grand-chose, depuis qu’il a débarqué en Auvergne. Pas toujours à son avantage dans l’exercice de la mêlée fermée, Alaalatoa ne cumule que 6 feuilles de match et 3 titularisations, sur 15 possibles. Ses concurrents au poste, Régis Montagne et Christian Ojovan, lui sont régulièrement préférés. Le temps de l’acclimatation ? La deuxième partie de saison devra y répondre.
9. Tani Vili
Centre - Vannes
24 ans
Club précédent : Bordeaux-Bègles
6 matchs de Top 14 cette saison - 0 point
Le temps passe, et la carrière de Tani Vili ne semble toujours pas vraiment décoller. À 24 ans, il fait désormais figure d’éternel espoir, et ce n’est pas sa première partie de saison à Vannes qui contredira ce triste constat. Titularisé à seulement trois reprises en quinze matchs, aucun coup d’éclat ni action marquante à son compteur, celui qui fut tôt appelé par le XV de France (19 ans) rentre doucement dans le rang et dans un certain anonymat. Rien, en tout cas, qui puisse pour l’instant aider le promu vannetais à s’extraire du fond de tableau. C’est d’autant plus dommage que le potentiel, lui, est réel et même immense. Phénomène dans les catégories de jeunes, Vili était annoncé comme un futur Bleu en puissance. Ses premiers pas à Clermont confirmaient tout cela, avant le chemin de la gloire ne se détourne, à l’UBB puis désormais en Bretagne. Tâche à lui de le retrouver, désormais.
10. Kitione Kamikamica
Troisième ligne centre - Vannes
28 ans - 8 sélections (Fidji)
Club précédent : Racing 92
6 matchs de Top 14 cette saison - 5 points
Kitione Kamikamica faisait partie de ces joueurs avec une certaine expérience du Top 14 (plus de 60 matchs dans l’élite), censés permettre au RC Vannes de rivaliser dans l’élite du rugby français. Passé dans Morbihan lors de la saison 2028-2019, au cours de laquelle il avait été très bon, il aurait dû très rapidement se fondre dans le collectif du RCV. Malheureusement pour lui et le club breton, son impact sur le collectif n’est que trop minime… Le troisième ligne fidjien a disputé les cinq premières rencontres de Top 14 - une seule en tant que titulaire, alignant les prestations assez neutres avant de disparaître des radars pendant plus d’un mois et d’être aligné de nouveau face à Bordeaux. De fait, Kitione Kamikamica n’aura que trop peu permis au titulaire Sione Kalamafoni de souffler.