C’est une des dernières étapes avant un procès. Ce lundi 5 août, le parquet de Paris a requis le renvoi pour assassinat à l’encontre de Loïk Le Priol, 30 ans, et Romain Bouvier, 33 ans, après plus de deux ans d’instruction. Un crime passible de la perpétuité. En 2022, ces deux militants d’extrême droite, anciens membres du Groupe Union défense (GUD), ont tiré sur Federico Martin Aramburu. L’ex-rugbyman argentin, figure du Biarritz Olympique, s’est effondré sur le boulevard Saint-Germain.
L’enquête s’est notamment attachée à déterminer le caractère prémédité ou non de ce crime. En retenant la qualification d’assassinat, le parquet se range en faveur d’une préparation. C’était aussi la thèse défendue par les parties civiles. « Au terme d’une instruction pendant laquelle les mis en examen ont tenté de se défausser de leurs terribles responsabilités, la famille de Federico Martin Aramburu est soulagée que le parquet de Paris ait donné l’exacte qualification aux faits dont il a été victime », salue Me Yann Le Bras.
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« Chasse à l’homme »
C’est aussi « un soulagement » pour Shaun Hegarty. L’actuel président du Biarritz Olympique était au côté de « Fédé » au moment du drame. Pour le parquet, il est victime de violences volontaires avec armes. Le choc traumatique lui a valu 21 jours d’ITT. « Il a le sentiment que la responsabilité retenue est en adéquation avec ce qu’il a vécu, explique Me Christophe Cariou-Martin. Il est reconnaissant du travail mené par les trois juges d’instruction, les enquêteurs et les experts. Reconnaissant aussi envers les témoins, venus, spontanément parfois, expliquer ce qu’ils ont vu ou entendu. »
Le drame s’est déroulé en deux phases. Pour le parquet de Paris, elles constituent « une seule scène unique de violence, qui est la mise en œuvre du projet prémédité ». En milieu de nuit, le 19 mars 2022, Federico Martin Aramburu et Shaun Hegarty dînent en terrasse, à la brasserie Le Mabillon. Loïk Le Priol et Romain Bouvier sont attablés non loin. Les groupes se rapprochent. Les premiers instants de cordialité laissent place à des tensions. Une blague potache du rugbyman argentin achève d’enflammer les esprits.
Après une première altercation, Federico Martin Aramburu et Shaun Hegarty quittent les lieux à pied. « Pour eux, c’est un événement sans en être un. L’affaire était terminée, ils passaient à autre chose », explique Me Cariou-Martin. Ils ignorent que Le Priol et Bouvier se lancent à leurs trousses. Des témoins, présents à proximité du Mabillon, décrivent leurs mots et leurs attitudes, symptomatiques d’une volonté d’en découdre. Pour le parquet, ils « corroborent une atmosphère de chasse à l’homme ».
Trois balles dans le dos
Romain Bouvier et Loïk Le Priol ont l’habitude de sortir armés. Ils portent des pistolets à la ceinture. Des pièces de collection pour lesquelles ils ne risquent pas grand-chose. Mais ces armes restent létales. Le premier embarque dans la Jeep de Loïk Le Priol avec la petite amie de ce dernier (lire par ailleurs). Quand il retrouve les Biarrots, il descend de la voiture et tire, bras tendu, à quatre reprises. Federico Martin Aramburu est touché à la cuisse et dans le flanc. L’Argentin tente de fuir lorsque déboule, en courant, Loïk Le Priol. Dans l’empoignade, le rugbyman est touché à nouveau. Le jeune homme l’achève de trois balles dans le dos.
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Durant l’instruction, les avocats de Romain Bouvier ont tenté de le dissocier de l’issue fatale (1). Les premiers tirs n’étaient pas mortels. Il a expliqué avoir appuyé sur la détente par peur, avant de renoncer. « Le parquet a considéré que l’on ne pouvait pas le détacher en demandant son renvoi pour assassinat », estime Me Cariou-Martin.
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Loïk Le Priol a, lui aussi, mis en avant un état de légitime défense et nié avoir poursuivi les Biarrots. Son avocat n’a pas souhaité commenter les réquisitions du parquet. Il dispose désormais d’un temps pour formuler des observations au juge d’instruction. Ce dernier devrait prochainement ordonner la mise en accusation de Loïk Le Priol et Romain Bouvier devant la cour d’assises. Une décision susceptible d’appel.
(1) Nous ne sommes pas parvenus à les joindre.
Complicité requise pour la conductrice
Le parquet requiert le renvoi de Lison Rochemir pour complicité d’assassinat. La compagne de Loïk Le Priol a pris part au conciliabule devant le Mabillon. Elle a garé la Jeep quand Romain Bouvier et elle ont retrouvé les victimes. Après le crime, elle a aidé à cacher les armes, les téléphones et le véhicule. Le parquet demande également le renvoi d’un quatrième homme, ayant aidé Loïk Le Priol
dans sa cavale.