Des messages vocaux de la plaignante diffusés dans la presse sèment la discorde dans l'affaire de Mendoza Alors que le parquet doit décider lundi de l'éventuelle remise en liberté d'Hugo Auradou et Oscar Jegou, des messages vocaux de la femme qui accuse les deux Français de viol avec violences en réunion ont été diffusés dans la presse, laissant planer un doute à propos du consentement.
C'est à une véritable bataille de l'information que se livrent les parties, alors que le parquet doit décider, lundi au plus tard, s'il maintient ou non les deux Français en détention. Assignés à résidence depuis le 17 juillet, accusés par une femme de 39 ans et mis en examen pour viol avec violences en réunion, Hugo Auradou et Oscar Jegou pourraient retrouver leur liberté.
Vendredi matin, des messages vocaux WhatsApp échangés entre la plaignante et une amie, témoin dans l'affaire et présente le soir des faits, ont été publiés dans la presse locale et nationale. Les messages, retranscrits ou publiés sous forme d'audios en modifiant la voix de la plaignante, avaient déjà filtré depuis plusieurs jours, mais n'avaient pas été diffusés par la presse. Pour certaines rédactions, comme L'Équipe, la décision avait été prise afin d'en vérifier l'authenticité.
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Certains de ces messages vocaux semblent aller plutôt dans le sens d'un consentement de la relation sexuelle, même si des zones d'ombre persistent. « Il y a des vidéos de l'hôtel, des vidéos de la boîte de nuit, des messages vocaux entre la plaignante et une de ses meilleures amies. Et de tout ce contexte [...], plus les déclarations des témoins, il est clair que le "oui" a toujours existé. Avant, après et pendant », avait ainsi affirmé German Hnatow, l'un des avocats des deux joueurs à l'issue de leur audience, jeudi.
Un ton de plus en plus grave au fil des échanges
« La défense avait tout intérêt à ce que ces messages soient divulgués. Mais je veux rappeler que c'est nous qui avons proposé ce témoin (l'amie) et qui avons mis les audios à disposition de la justice. La victime est tellement convaincue de sa vérité et convaincue des faits qu'elle dénonce, qui sont des faits très graves avec des peines très lourdes, qu'elle n'a absolument rien voulu occulter », tient d'abord à rappeler l'avocate de la plaignante. Elle précise : « Mais dans ce qui a été diffusé, il n'y a pas l'intégralité des messages et ils ont été sortis de leur contexte. »
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Au total, il s'agit « d'environ 23 messages », d'après le témoignage de l'amie. Seuls six, choisis, ont été diffusés auprès de la presse locale, dont certains partiellement. Dans ces échanges, troublants - dont nous avons pu écouter certains et lire le contenu d'autres - et qui, du point de vue de la défense, sont un élément clé pour prouver le consentement, on l'entend raconter des détails de sa relation avec les joueurs. Le ton évolue. Plus léger au départ, il finit, au fil du temps et de la discussion avec son amie, à prendre une teneur plus grave.
Le premier message vocal est envoyé vers 5 h 30. La femme se trouve alors devant la porte de la chambre 603 de l'hôtel Diplomatic après avoir rencontré les joueurs dans la discothèque le Wabi. Elle attend, seule, tandis qu'Auradou est descendu à la réception chercher une carte magnétique afin de pouvoir entrer dans la chambre. « J'ai rencontré un joueur de rugby étranger. Je suis à son hôtel, donc ne compte pas sur moi, OK ? Écoute le message. »
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Dans la conversation qu'elles ont plus tard, avant qu'elle ne fasse sa première déposition en fin de journée le 7 juillet, quelques heures après les faits, la plaignante articule mal. À leur écoute, il ne fait aucun doute qu'elle est « encore un peu sous les effets de l'alcool et des médicaments qu'elle a pris à la suite des faits pour s'apaiser et calmer ses douleurs », comme l'affirme son avocate. Elle aurait pris des anxiolytiques et des analgésiques, d'après Me Natacha Romano. Ce que la plaignante aurait ratifié lors de sa déposition mardi.
« "Loca" (façon familière d'interpeller quelqu'un en Argentine). Merci pour ton soutien. J'ai rencontré un joueur de rugby français. Super grand, le type. Trop beau... trop beau. Je suis arrivée à la maison à 9 heures du matin. À 9 heures ! Je te dois la vie. Tu m'as bien aidée en me déposant ici avec X (nom de sa fille). Toujours la même histoire. Pour une fois que je sors, j'en ai profité "boluda" (façon familière de s'adresser à une amie en Argentine) » , raconte-t-elle.
« Comme je ne peux pas bouger et que je suis pleine de bleus, elle va sûrement m'emmener au ministère public »
La plaignante au sujet de son avocate
Dans d'autres messages, elle détaille : « Il m'a défoncée ! Il m'a défoncée. » Elle décrit ses blessures : « Il m'a attrapé la joue, il m'a laissé un bleu sur le visage, sur la mandibule, sur le cul, des griffures dans le dos... non... t'imagines pas. »« "Boluda", il m'a explosée, le mec. J'ai le dos meurtri. J'ai la mâchoire blessée [...] J'ai un oeil au beurre noir, meuf. Super mignon le type, mais quand il baisait... Terrible le brun. Magnifique. Des yeux... Mais "boluda", j'ai dû prendre un Diclofenac parce qu'il m'a défoncée. »
Son avocate, Me Romano, explique : « Comme c'est typique chez toutes les victimes d'abus sexuel, pas seulement elle, à se rendre compte de ce qu'il s'est passé, elle trouve le courage de raconter à son amie les faits dont elle a souffert. D'abord, la violence, après le premier abus, et ensuite, elle finit par lui confesser qu'ils étaient deux. »
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« Natacha (son avocate) est en train de déposer la plainte. Et comme je ne peux pas bouger et que je suis pleine de bleus, elle va sûrement m'emmener au ministère public pour qu'ils me prennent des photos de tout le corps. Alors... oui, c'était un abus sexuel. Parce qu'un autre joueur est rentré dans la chambre. Quand j'étais avec lui, un autre est rentré dans la chambre et ils m'ont violée. Mais ne le dis à personne, s'il te plaît. Je suis morte de honte », raconte la plaignante.
L'amie répond : « Oui "boluda", bien sûr. Je ne savais pas ça. Ça fait vraiment beaucoup. Qu'un autre soit rentré dans la chambre ! Et toi qui voulais partir [...] » Dans un autre message, elle poursuit : « On accepte ou pas la violence dans une relation sexuelle. Mais si tu étais en train de lui dire que tu voulais partir et que le mec te met un coup de poing dans l'oeil, t'attrape le cou, te frappe et qu'en plus, maintenant, tu me dis qu'un autre type est rentré dans la chambre sans ton consentement, alors que tu voulais partir... "Boluda", ça c'est un viol ! Il n'y a pas à tergiverser. »
On commence à y voir plus clair avec ces échanges vocaux, visiblement c'est une relation consentie au départ et puis ça part en vrille au fur et à mesure de l'acte, bon courage aux juges pour déterminer les culpabilités des protagonistes dans cette affaire.