Les dérives du rugby
#256
Posté 01 décembre 2024 - 20:54
#257
Posté 01 décembre 2024 - 21:03
C'est Le Monde qui a retranscrit ses phrases : « Oui, il fallait ouvrir les portes de cette salle, inviter la société tout entière à se saisir de ce dossier, faire de nos débats le terreau d'une prise de conscience, d'un changement des mentalités, d'un avenir meilleur qui romprait enfin avec une violence que l'on voudrait d'un autre âge. Comment en France, en 2024, une femme peut-elle encore subir ce qui a été infligé à Gisèle Pélicot pendant au moins dix ans ? Comment en France, en 2024, peut-on trouver 50 individus sur un rayon de 50 km pour profiter sexuellement, sans le moindre échange, d'un corps qu'on croirait mort et qu'il faut rouler sur lui-même pour le mouvoir ? »
Marie (le prénom a été modifié) ne veut pas être la « Gisèle Pélicot » du monde du rugby et devenir un symbole ou une porte-parole. Elle a tranché. Et Bordeaux ne sera pas Mazan. Le procès ne sera pas public. Ce lundi après-midi, quand l'audience commencera, la jeune femme prendra la parole et réclamera le huis clos. Comme en juin, lorsqu'à la surprise générale elle s'était levée, soutenue par ses amis, sa famille, et avait demandé au tribunal que les débats se tiennent sans la présence des médias et du public. Le parquet nous avait fait savoir qu'en la matière, il était systématiquement accepté lorsque la partie civile le sollicitait. Marie-Noëlle Billaud, la présidente, avait accepté en juin. Elle le fera à nouveau.
La plaignante a pourtant hésité. Longtemps. En juin, quelques jours avant le début de l'audience, elle semblait motivée et décidée à l'idée d'affronter, aux yeux et aux oreilles de tous, les débats et les cinq accusés. Puis elle a changé d'avis, brutalement. Pourquoi ? L'absence de Denis Coulson aurait tout déclenché. En apprenant la nouvelle de l'accident, Marie a reçu un choc. « Elle est à ramasser à la petite cuillère », avait-on confié dans son entourage. Sept ans, c'est long et interminable. À l'époque des faits, elle était étudiante. Aujourd'hui, elle travaille à des milliers de kilomètres de Bordeaux.
#258
Posté hier, 07:08
Marie (le prénom a été modifié), la plaignante, est arrivée peu avant 14 heures : avec elle, autour d'elle, une dizaine de personnes, ses amis, sa mère, son frère la couvant, la protégeant des regards. Cheveux longs et blonds, vêtue de noir avec un chandail vert, elle semblait détendue, même si on l'a aperçue avant l'ouverture de l'audience, triturer et malmener le foulard qu'elle portait autour du cou.
Les cinq accusés étaient là, aussi. Ceux qui sont soupçonnés d'avoir violé celle qui était étudiante à l'époque des faits : Denis Coulson, qui ne joue plus, Loïck Jammes, le talonneur d'Aix-en-Provence (Pro D2), et Rory Grice, le troisième ligne d'Oyonnax (Pro D2) ; et ceux qui ont été mis en examen, quatre ans après le début de la procédure, pour ne pas avoir su empêcher un crime : Chris Farrell, qui joue avec Grice, et Dylan Hayes, jeune retraité, étaient là ou sont passés dans la chambre, mais n'auraient rien fait et n'auraient rien dit, estimant que tout était normal.
Farrell et Grice étaient d'ailleurs titulaires vendredi soir en Pro D2, un choix assez déroutant, risqué et presque inconscient, une grave blessure étant toujours possible dans ce sport de combat. Et pour rappel, le procès devait initialement se tenir en juin, mais avait été ajourné à cause de l'absence de Coulson. Quelques jours plus tôt, alors qu'il se rendait à l'aéroport afin de monter dans un avion pour Paris où son avocate Me Corinne Dreyfus-Schmidt l'attendait pour se replonger dans le dossier, il avait été victime d'un accident de la circulation.
Seul, il avait perdu le contrôle de sa voiture dans un tunnel de Dublin. Les photos alors prises par des témoins sont terribles. Le véhicule est détruit et Coulson est allongé à côté, en short et tee-shirt, le pied droit quasiment arraché. Opéré en urgence, il a donc récupéré, pas totalement, mais suffisamment pour se présenter lundi. Il boite et utilise une béquille pour se déplacer. Très fragile et fébrile psychologiquement, selon son avocate qui a déclaré qu'il avait frôlé la mort, il a obtenu le droit que son père et sa soeur assistent au débat malgré le huis clos...
Car, comme prévu, le public et les médias ne seront pas autorisés à suivre ce qui se dit à l'intérieur de cette salle du tribunal à Bordeaux, à écouter les témoignages et à voir les vidéos de surveillance, ou les images tournées par un des occupants de cette chambre 908. Après le tirage au sort des jurés (4 hommes et 2 femmes), Me Anne-Cadiot Feidt, un des conseils de la plaignante, en a fait la demande auprès de Marie-Noëlle Billaud, la présidente du Tribunal.
Après une courte délibération, le huis clos a été accordé, la juge s'appuyant sur l'article 306 du code de procédure pénale : « Lorsque les poursuites sont exercées du chef de viol ou de tortures, et actes de barbarie accompagnés d'agressions sexuelles [...] le huis clos est de droit si la victime partie civile ou l'une des victimes parties civiles ne s'y oppose pas. » Ce choix a fait réagir Jean-Félix Luciani, l'un des avocats de Jammes.
S'il a concédé qu'il ne remettait pas en cause la requête, il a voulu souligner son incohérence, pointant du doigt l'attitude des avocats de la plaignante qui « ont dès le début de l'histoire voulu médiatiser l'affaire avec un premier article dans le Monde, publié dès 2018 ». Un argument repris dans la foulée par Me Corinne Dreyfus-Schmidt, l'avocate de Coulson, qui a dit aussi, de manière très sèche, son étonnement et son incompréhension.
À 14 h 47, les policiers ont donc fait évacuer la salle, le public et les nombreux journalistes présents. Ont pu rester, et resteront jusqu'au 13 décembre, le père et la soeur de Coulson, une amie de la victime, une membre de l'association Vict'aid, un service d'aide aux victimes qui soutiendra Marie durant l'épreuve.
Les experts médicaux, qui prendront la parole mercredi, ont également obtenu l'autorisation d'assister aux débats qui ont commencé lundi sur l'enquête de personnalité de Farrell et de Hayes, ceux qui clament qu'ils n'ont rien fait. « C'est d'ailleurs ce que la justice leur reproche », résume Me Arnaud Lucien, l'avocat du second.
La cible ? La victime, « qui s'est mise en danger parce qu'elle a beaucoup consommé d'alcool... » « Les rapports sexuels sont reconnus, poursuit-elle, c'est la perception qu'ils ont du comportement de cette jeune fille qui pour eux était parfaitement consentante, dans la mesure où elle était active. Elle a participé activement à toutes les relations sexuelles. Cela a été filmé, et ce film est très évocateur, je pense que c'est pour cela que ça dérange un peu la partie civile. »
L'axe de défense a évolué ces derniers mois
Mais peut-on consentir quand on est ivre ? Corinne Dreyfus-Schmidt en a l'intime conviction, s'appuyant sur des rapports d'experts qui seront épluchés pendant l'audience : « Le fait de ne pas mémoriser des événements ne signifie pas que vous en avez conscience... La mémoire est bloquée, mais il y a une conscience des actes. » Arnaud Lucien, qui défend Dylan Hayes, a également évoqué la vidéo tournée par Coulson. Elle dure 55 secondes : « Et elle ne montre pas un viol. »
Les mois passent et l'axe de défense évolue. En juin, après l'ajournement, l'avocate de Coulson, Me Corinne Dreyfus-Schmidt, avait adopté un autre discours, plus rond, plus empathique : « Mon client a énormément honte de ce qui s'est passé ce soir-là, bien qu'il considère que cette jeune femme était consentante. Avec le recul, ils étaient tous très alcoolisés, y compris les joueurs. Il a compris effectivement que, si cette jeune fille a indiqué qu'elle n'était pas dans un état de conscience suffisante, peut-être que les signes extérieurs qu'elle montrait ne correspondaient pas à sa volonté... » Le discours et la méthode ont changé. Le procès a vraiment débuté.
- ZACH aime ceci
#259
Posté hier, 14:18
"S’ils sont condamnés, ils seront licenciés", déclare le président d’Oyonnax à propos de Rory Grice et Chris Farrell.
Ca me parait logique.
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